contribution de Laurent Fabius au Projet des socialistes
Laurent FABIUS
Mai 2006
Quelques propositions pour notre projet
Notre projet arrive dans sa phase décisive. Un texte sera bientôt proposé à l’examen de la Commission nationale du projet et du Bureau National, avant d’être soumis au vote des militants. Deux présentations successives en ont été faites ces derniers jours, une première fois dans l’Hebdo sous le titre « Pour une vie meilleure dans une France plus juste », une seconde fois dans un rapport de synthèse intitulé « Réussir ensemble ». Ayant pris connaissance de ces documents, je souhaite insister brièvement sur quelques éléments peu ou insuffisamment évoqués et qui me paraissent devoir être affirmés avec une particulière clarté.
1) Dans notre analyse, un impératif s’impose à nous, être lucides sur le contexte dans lequel nous allons agir : la crise française est profonde, la victoire de la gauche est indispensable, mais elle n’est pas encore acquise. Pour enrayer les risques et parce que c’est le sens même de notre combat, notre projet doit se situer clairement à gauche. Pour rassembler la gauche, nous devons refuser toute dérive blairiste ou centriste.
La France traverse une crise profonde. Notre projet ne doit pas donner l’impression de la sous-estimer : d’économique et sociale, elle est devenue aussi institutionnelle et de régime. Il en résulte une puissante demande de changement, qu’illustre d’ailleurs la répétition, chaque fois plus forte, des votes sanctions depuis 2002. Avec l’Inde, la Chine et l’Internet, la mondialisation a changé de dimension ; avec la domination de la finance mondiale, le capitalisme a changé d’impact. Cela a pour conséquences une précarité et des inégalités accrues, que la majorité des salariés n’acceptent plus. L’importance des mobilisations sociales en témoigne et il faut en tenir compte. Les attentes à l’égard de l’Europe sont fortes, alors même que celle-ci ne progresse et ne protège pas assez. La crise française, la droite revancharde contre le modèle social et républicain, la mutation du capitalisme, l’attente à l’égard de l’Europe sont quatre faits majeurs qui rendent cruciaux les enjeux de 2007 : cette prise de conscience doit apparaître clairement dans notre projet pour montrer que nous serons à la hauteur de la situation
Dans ce contexte, la victoire indispensable de la gauche n’est pas encore acquise et plusieurs risques ne doivent pas être sous-estimés : un succès de Sarkozy, au nom du triptyque libéralisme, communautarisme, atlantisme, avec le soutien de puissances financières et médiatiques ; le danger Le Pen, tirant mécaniquement profit de la crise ; le risque d’une cassure entre une gauche molle vouée à la gestion et une gauche radicale centrée seulement sur la contestation. Pour enrayer ces risques et parce que là s’est forgée l’identité socialiste, notre projet doit être clairement à gauche, dans nos valeurs et nos références, qui devront être celles du socialisme français – liberté, égalité, laïcité, République, Europe, internationalisme – et non celles du blairisme – flexibilité, ordre moral – ou d’un « réformisme de gauche » sans ambition suffisante de transformation. Faisant cela, ne donnons pas l’impression d’hésiter sur les fondamentaux de la République : ce sont les nôtres et nous devons leur donner toute leur force dans notre projet par une politique d’égalité en actes. Là est la meilleure réponse à la crise que traverse notre pays
Il en va de même pour nos alliances qui sont, normalement, le prolongement des convictions. Plusieurs responsables ont laissé entendre qu’un rapprochement avec le centre était possible dans le cadre de l’élection présidentielle. Notre projet doit stipuler que nous n’envisageons collectivement de gouvernement qu’à gauche, avec des partis de gauche, pour mener à tous les échelons, du local au mondial, une politique de gauche. Sur la base de notre projet socialiste, nous devons rapidement engager les discussions en ce sens avec nos partenaires. Les militants d’abord, les Français ensuite, veulent savoir au nom de quels principes et avec quels partenaires nous entendons agir. Nous sommes à gauche dans l’opposition, nous le serons aux responsabilités.
2) Clairement à gauche, nous devons aussi l’être dans nos propositions et nos priorités.
Beaucoup d’idées et de propositions, souvent justes, ont déjà été avancées. Dans la présentation de nos engagements, nous devons être particulièrement clairs sur quatre grands objectifs d’action de la prochaine législature. Chacun doit donner lieu à des propositions précises. J’insiste sur les suivantes, qui ne sont pas exclusives d’autres propositions avancées dans le cadre du texte de travail. Je précise que les abrogations des mesures les plus injustes et liberticides de la droite seront nécessaires – je pense notamment au CNE, à l’apprentissage à 14 ans, à la loi Fillon sur les retraites, aux lois Perben 2 et à la loi Sarkozy sur « l’immigration choisie » :
1. Fonder une République nouvelle. C’est une nécessité et un préalable. Ne nous contentons pas d’affirmer que nos institutions sont en désordre et qu’il faudra les ajuster, car cela Sarkozy le dit aussi. Expliquons que cette refondation démocratique et républicaine est une condition à la réussite dans la durée de l’action et des réformes nécessaires. Soyons clairs sur l’objectif - une République nouvelle - et la nature du régime que nous souhaitons : une République parlementaire. Faisons de l’efficacité, de la responsabilité, de la transparence et de la participation les piliers de cette République nouvelle. Et pour cela, adoptons des mesures fortes : pour un Président arbitre et non plus monarque irresponsable (il ne présidera plus le Conseil supérieur de la magistrature et ne nommera plus les membres du Conseil constitutionnel), un gouvernement paritaire avec un vice-premier ministre chargé des affaires européennes, un Parlement respecté et représentatif (suppression du 49-3, introduction d’une dose de proportionnelle), une classe politique renouvelée (mandat unique), des partenaires sociaux reconnus (obligation de les consulter avant de légiférer sur les principes fondamentaux du droit du travail et de la sécurité sociale), des citoyens écoutés (participation obligatoire au vote et reconnaissance du vote blanc, mise en ligne électronique de tout texte de loi un mois avant sa délibération par les assemblées, droit d’initiative législative, vote des étrangers non communautaires aux élections locales), une décentralisation clarifiée (compensation exacte des charges transférées aux collectivités locales), une laïcité réaffirmée (non par de vagues déclarations mais par une charte de la laïcité adossée à la Constitution, notamment pour qu’elle soit respectée à l’hôpital et garantir la mixité ; refus de tout mode de comptage ethnique ou religieux des citoyens ou des salariés). Cette République parlementaire nouvelle sera soumise à référendum dans les six mois qui suivent les échéances de 2007.
2. Faire barrage aux méfaits de l’hyper-capitalisme financier : à l’échelle internationale, nous devons reprendre le combat pour une taxe internationale sur les mouvements de capitaux spéculatifs, la lutte contre les paradis fiscaux et le blanchiment de l’argent sale et la création d’une organisation mondiale de l’environnement. La France a un rôle important à jouer dans le partage des richesses à l’échelle de la planète, par l’augmentation significative de l’aide aux pays du Sud, et un devoir d’exemplarité par le renoncement aux pratiques de la « Françafrique. » L’Europe doit imposer des normes strictes de protection de l’environnement et des consommateurs, lancer une politique sociale extérieure visant à bannir le travail forcé et le travail des enfants, exiger le respect des droits sociaux fondamentaux de l’organisation internationale du travail (OIT). A l’échelle française, le pouvoir des salariés doit être renforcé face à la finance et aux actionnaires : obligation de soumettre toute OPA au vote de l’assemblée générale des salariés ; présence des salariés dans les conseils d’administration et de surveillance des entreprise ; pour les plus hauts revenus, encadrement des rémunérations et des « super-parachutes » déconnectés des performances de l’entreprise ; fiscalité encourageant les entreprises à réinvestir leurs profits plutôt qu’à racheter leurs propres actions à des fins spéculatives. Contre les délocalisations, il faut aussi qu’une loi soit prise pour empêcher des patrons voyous de tirer profit de la réputation d’une marque acquise en France tout en vidant de sa substance le site national de production. D’autres mesures seront indispensables, comme l’obligation d’information très en amont des salariés et le remboursement des aides publiques. Pour les Français, pour les salariés, les dégâts du capitalisme financier et la menace des délocalisations sont des sujets de préoccupation majeurs. Ne donnons pas l’impression que nos propositions restent éloignées de ces réalités.
3. Relancer et réorienter l’Europe pour parvenir à une croissance forte et durable. Sans cette relance et cette réorientation de la politique européenne, nous ne parviendrons pas à mener pleinement nos politiques de croissance et de solidarité au niveau national. C’est donc un enjeu décisif, que nous devons présenter comme tel à nos électeurs. Par conséquent, il nous faut proposer à nos partenaires d’adopter des critères de convergence sociale, prélude à un Traité social pour harmoniser par le haut les droits sociaux dans l’Union, et un pacte pour la recherche qui mobilisera des dépenses échappant aux critères de Maastricht. Nous ne pouvons nous contenter de dire que le texte constitutionnel rejeté par les Français en 2005 ne pourra pas être approuvé par le Parlement, car en démocratie cela va se soi ! Il nous faut préciser que le prochain projet institutionnel, une fois renégocié, sera soumis au peuple par référendum. Disons aussi clairement qu’un moratoire sur l’élargissement est nécessaire tant que les règles de l’Union et sa solidarité internes n’auront pas été redéfinies. Et soyons clairs sur les frontières de l’Union : c’est seulement si sa géographie est stabilisée qu’elle pourra nouer des partenariats d’avenir indispensables avec ses voisins, notamment les pays de la zone Euro Méditerranée. Dans le même temps, nous devrons agir pour réorienter la politique économique européenne, largement responsable de la faible croissance : modification du rôle et des objectifs de la BCE, nouvelle politique budgétaire, commerciale et de la concurrence permettant une vraie « priorité européenne » et un « juste échange ». Au niveau français, outre la relance indispensable du pouvoir d’achat, il nous faudra favoriser puissamment l’investissement des entreprises et les PME (accès garanti à 25% de la commande publique et des grands groupes), privilégier l’éducation et la recherche, et multiplier au moins par dix l’effort en faveur des énergies renouvelables. A long terme, nous visons un développement durable et social-écologique. Notre objectif est de diviser par deux le chômage au cours de la législature : le projet des socialistes doit se fixer pour horizon l’objectif du plein emploi.
4. Répondre à l’urgence sociale. Pour cela, nous devrons :
- soutenir le pouvoir d’achat des salariés et des retraités : SMIC à 1500 € comme nous l’avions proposé avec force dès le Congrès du Mans, minimum retraite garanti d’au moins 1000 € et réexamen de la règle des 25 meilleures années, fusion progressive de l’IR et de la CSG pour libérer du pouvoir d’achat en faveur des salariés modestes.
- lutter contre la précarité du travail : outre la sécurité professionnelle avec l’institution d’un crédit formation et la taxation du recours au travail précaire, nous devons viser à créer sur la législature environ 500 000 emplois sécurité formation pour les jeunes sans formation, lesquels ont vocation à déboucher sur des CDI dans l’entreprise. Le chômage des jeunes est d’abord le chômage des jeunes sans qualification. Nous devons y répondre par une mobilisation sans précédent du service public de l’emploi, de la formation et des entreprises. Ce dispositif en faveur des jeunes devra être discuté avec les partenaires sociaux, ne donnons pas l’impression d’être hésitants sur sa nécessité.
- redonner à l’école son rôle de promotion républicaine : service public de la petite enfance et scolarité obligatoire à trois ans, renforcement de l’encadrement dans les zones prioritaires, pré-recrutement d’enseignants dans les quartiers populaires, augmentation significative de la dotation des universités, refus de remettre en cause la carte scolaire, le caractère national des universités et la mission première des enseignants (transmission du savoir dans le cadre du lien pédagogique).
- faire du logement une grande cause nationale et aller vers le droit au logement opposable : outre la construction de 120 000 logements sociaux par an, service universel gratuit de caution locataires propriétaires, application effective d’un indice permettant de freiner la hausse des loyers, principe du zéro subvention d’équipement pour les communes qui refusent d’appliquer la loi SRU – et non pas le seul renchérissement des pénalités financières qui ne dissuade pas réellement les communes anti-mixité.
- restaurer des services publics forts sur l’ensemble du territoire : un signe net doit être donné en ce sens par la reconquête du capital – et non seulement du contrôle – 100 % public d’EDF et GDF. Il ne faut pas seulement veiller aux missions de services publics, il faut garantir la présence et la spécificité des services publics sur l’ensemble du territoire. D’autres engagements sont attendus par les Français : un service public de l’eau ; l’obligation d’installation des médecins sur l’ensemble du territoire et des plans nationaux de prévention ; l’interdiction de fumer dans les lieux publics et la lutte contre l’obésité.
- nous préparer vraiment au vieillissement de notre société : le vieillissement est l’un des défis les plus importants ; les familles et les collectivités locales ont souvent le sentiment de devoir le relever seules ; les réponses et les efforts qu’il réclame ne peuvent pas être absentes de notre projet ; des mesures puissantes de solidarité devront être décidées pour la prise en charge des personnes âgées dépendantes (soutien à domicile, financement des structures collectives, APA, Alzheimer, etc…). Il faut avoir le courage de dire que la prise en charge de la dépendance sous toutes ses formes (vieillissement et handicap) représentera de l’ordre d’1 point de CSG et que cette mesure est plus juste que la suppression d’un jour férié.
- un signal fort de confiance doit être envoyé aux jeunes : des états généraux de la jeunesse seront réunis dans les six mois qui suivent l’élection présidentielle, afin d’adopter, après cette vaste consultation, des mesures aussi importantes qu’un service civique obligatoire de six mois et la reconnaissance des libertés numériques. C’est aussi dans ce cadre que sera examinée l’allocation autonomie pour tous les jeunes en formation ou en insertion.
La réalisation de ces objectifs impliquera la mobilisation d’importants moyens financiers. Cela suppose de l’honnêteté : la situation laissée par la droite, qui a creusé la dette et multiplié les cadeaux fiscaux à ses clientèles électorales, ne rendra pas les choses faciles. Cela exige de la volonté : oui, des marges de manœuvre existent, oui nous pouvons en dégager de nouvelles, et pas uniquement grâce aux fruits de la croissance ! Les exonérations de cotisations sociales dont l’efficacité sur l’emploi est faible ou nulle seront supprimées, en particulier pour les grandes entreprises. Les mesures Sarkozy-Villepin en faveur des catégories privilégiées seront abrogées. La liste des niches fiscales sera remise en cause. Tout en assurant l’indispensable sécurité du pays, le budget de la défense sera allégé, notamment pour tenir compte de la dimension européenne de notre action. Ce n’est pas désarmer la Nation que d’envisager une plus grande efficacité de la politique de défense en inscrivant les investissements et les moyens qu’elle implique dans un contexte de coordination européenne, avec pour étape décisive un siècle après Verdun, une armée franco-allemande.
Ces propositions et ces thématiques ne sont pas exhaustives. D’autres engagements concernant la société sont nécessaires, comme la démocratisation de la culture, l’indépendance effective de la justice, l’humanisation des prisons, la lutte vigoureuse contre les discriminations, la solidarité quotidienne avec les personnes handicapée, ou encore l’égalisation des droits entre les couples homosexuels. Ces propositions importantes doivent figurer dans le projet qui sera soumis aux militants.
Pour redresser notre pays et redonner une perspective de progrès à tous, nos électeurs attendent de nous non pas des mots flous et des valeurs ambiguës mais des engagements clairs. Notre projet doit permettre de rassembler la gauche et de changer vraiment. Il doit nous permettre de fonder une République nouvelle, porter un coup d’arrêt aux méfaits de la mondialisation financière, relancer la croissance et l’Europe, et répondre à l’urgence sociale. Car oui, la France a un avenir et cet avenir est à gauche. Tel est le sens de ces propositions et l’enjeu de 2007.
de l'école à la vie professionnelle
Contribution au Projet socialiste
De l’école à la vie professionnelle, quel projet éducatif pour la jeunesse ?
Propositions issues du débat organisé à Thaon-les-Vosges, à l’initiative de la Section Avière-Durbion, et des rencontres avec les syndicats d’enseignants
L’école doit être un vecteur de progrès social :
Elle ne doit pas seulement répondre à la demande du marché, mais surtout être source d’ouverture d’esprit et d’épanouissement personnel.
Elle doit permettre les conditions nécessaires pour prolonger la scolarité, notamment en direction des populations défavorisées.
L’école ne doit pas se contenter d’être le reflet de la société et de répondre au besoin de compétition et de concurrence de la société libérale.
Elle doit atténuer le système de discriminations de la société.
La Lorraine est en retard pour l’obtention du BAC et les Vosges sont en retard pour l’accès à l’emploi des jeunes. Il faut donc avoir plus d’ambition et mieux prendre en compte les situations sociales difficiles.
Apporter des réponses sociales :
Prévenir les sorties du système scolaire sans qualifications en traitant les causes avant les symptômes
Aider les familles en difficultés, lutter contre l’absentéisme
Rétablir les personnels d’accompagnement scolaire, tels les médecins, les infirmières, les assistantes sociales dans leur statut de fonctionnaire de l’Education national et renforcer leur recrutement
Doter tous les établissements d’enseignement public des personnels pouvant venir en aide aux élèves, psychologues et éducateurs, afin que ces moyens ne soient pas seulement l’apanage des établissements privés
Promouvoir une réelle égalité, la gratuité scolaire y compris pour les fournitures, la cantine, l’accès aux bibliothèques et aux transports
Pour la petite enfance :
Combattre les inégalités dès la petite enfance par une scolarisation précoce en maternelle
Rendre l’école obligatoire à 3 ans ne doit pas exclure l’accueil dès 2 ans pour répondre à une demande de scolarisation, avec la mise en place d’un encadrement adapté ( espaces, effectifs )
Prendre réellement l’école maternelle en compte dans la formation initiale des maîtres
Limiter les effectifs à 25 élèves en maternelle, ce qui vaut aussi pour l’élémentaire
Répondre aux groupes de besoins avec 4 maîtres pour 3 classes, y compris en RPI
Redonner les moyens aux réseaux d’aide en milieu rural privés actuellement d’enseignants spécialisés, de médecins, d’infirmières et d’assistantes sociales
Créer un nombre suffisant de structures nécessaires pour l’accueil des enfants handicapés et des élèves en difficultés, afin que l’un ne se fasse pas au détriment de l’autre
Prendre d’avantage en compte la gestion de difficultés scolaires comme la dyslexie
Combattre les inégalités sociales et l’isolement culturel en développant l’accès à la culture et à la connaissance pour tous
Faire accéder tout le monde aux apprentissages fondamentaux et à une culture commune en développant les structures d’aide et de soutien
Créer un service public de garde de la petite enfance, favorisant ainsi une évolution sociale et une amélioration des conditions de vie de la famille par l’accès à la formation et à l’emploi pour les parents
Donner à l’éducation à l’orientation toute sa place :
Stopper l’érosion du corps des COP à peine cités dans la loi Fillon et redonner sa place à l’éducation à l’orientation devenue inexistante
Arrêter la marche forcée de la privatisation de l’éducation nationale qui a déjà pris effet dans la formation professionnelle
Donner les moyens de l’éducation à l’orientation à l’éducation nationale en recrutant un nombre suffisant de Conseillers d’Orientation Psychologues afin que tous les élèves puissent bénéficier des bilans et évaluations nécessaires à l’évolution de leur cursus scolaire ou à la construction d’un projet professionnel si le jeune fait le choix d’une entrée dans l’enseignement professionnel. Il n’est pas acceptable que seuls les parents qui en ont les moyens puissent obtenir des bilans cohérents par des services d’orientation privés qui se font payer très cher !
Rénover et revaloriser les Lycées Professionnels, devenus les parents pauvres du système scolaire accueillant les publics en difficultés, et leur donner toute leur place afin de renforcer les dispositifs de formation professionnelle au sein du service public d’éducation nationale : la réussite majeure passe par le BAC PRO, point clé de l’orientation et d’une insertion réussie
Prévenir les sorties du système scolaire sans qualification en traitant les causes avant les symptômes
Développer l’attrait de la formation à des métiers, déployer des moyens nouveaux pour aider les jeunes à construire leur projet et réussir leur entrée dans la vie active
Recréer du dynamisme dans certains métiers, améliorer la qualité du travail, accompagner l’évolution et l’adaptation, poser le problème des parcours professionnels et définir des méthodes
Revaloriser les métiers de l’artisanat, et les formations professionnelles qui peuvent être, elles aussi, porteuses de diplômes qualifiants
Mettre la formation en alternance sous statut scolaire avec une prise en compte pédagogique, y compris de l’acte de travail de l’apprenti
Promouvoir l’indépendance des jeunes grâce à une allocation d’autonomie, une réelle prise en compte des problèmes matériels liés aux études ou à la préparation d’un projet professionnel
Apprendre à vivre ensemble en instituant une période de service civil à 18 ans, mettre à profit ce temps pour rendre un service social et faire l’apprentissage du civisme
Changer les statuts des stagiaires non rémunérés comme les élèves ingénieurs qui sont souvent exploités et considérés comme de la main d’œuvre à bon marché, parfois sans encadrement. Une rémunération suffisante doit permettre de subvenir aux frais de déplacement, de nourriture et de logement. ( dépenses ruineuses pour les familles, rendues inaccessibles pour les plus pauvres )
Prendre en compte les différentes origines sociales et culturelles dans des programmes actuellement faits pour les classes moyennes et facteurs de discriminations
Prendre en compte la culture populaire et intégrer différentes formes de cultures au sein de la culture commune
Favoriser l’expression orale en langues vivantes grâce à des groupes à effectifs réduits et un apprentissage dès la maternelle
Donner réellement les moyens au collège de remédier aux difficultés des élèves en mettant en place des groupes de besoin et les stratégies d’aide et de soutien, ce qui suppose de recruter des enseignants et de revenir sur les suppressions de postes
Lutter contre la précarisation de la fonction enseignante, redonner des places aux concours et revoir les statuts des vacataires ( le problème des 200 h pour l’enseignant que l’on congédie dès la 201ème heure et pour les élèves de voir se succéder 3 professeurs différents dans la même matière au cours de l’année scolaire )
Former les enseignants pour favoriser une pédagogie de l’aide aux élèves en difficultés scolaires
Conclusion
A la différence de la droite, nous mettons l’éducation au cœur de la société de solidarité que nous voulons construire. Nous refusons la précarité institutionnalisée par les politiques libérales qui n’ont comme objectif que la rentabilité et le profit.
Nous voulons une refondation ambitieuse de l’école, une véritable école de l’exigence. Nous voulons construire l’école du 21ème siècle et empêcher le droite de poursuivre son œuvre destructrice de l’école. Il faut abroger la loi Fillon !
Nous refusons aussi l’idée du déclin, prétexte à toujours plus de précarisation. Notre pays est riche, il a des atouts, il lui faut retrouver le chemin du développement économique par le biais d’une recherche dynamique ( que nous devrons amener à 3% du PIB ) levier indispensable d’une politique industrielle volontaire face aux délocalisations, d’un rayonnement culturel et d’un emploi qualifié pour demain.
Le fondement du système éducatif pour construire la société que nous voulons, c’est déjà l’accès à une formation initiale, une culture commune qui permette l’accès à une formation professionnelle, qui ouvre la voie à une formation tout au long de la vie à travers des parcours professionnels sécurisés et un vrai plan d’entrée dans la vie active pour les jeunes, grâce à une allocation d’autonomie et à une couverture professionnelle universelle.
L’école a un grand rôle à jouer pour favoriser l’égalité, l’accès à la connaissance et à la culture, l’épanouissement et l’émancipation des jeunes. Notre projet éducatif doit leur redonner confiance et espoir dans l’avenir.
Ne perdons jamais de vue que c’est la question sociale qui est au cœur du système, et que l’école ne peut à elle seule résoudre les problèmes matériels, les difficultés sociétales. L’emploi, principale préoccupation des Français, le pouvoir d’achat et le logement sont avec l’école les vecteurs du progrès et de la remise en route de l’ascenseur social.
N’oublions pas que les enfants et les jeunes passent moins de temps dans l’école qu’ils n’en passent au sein de leurs familles et dans leurs quartiers. Les associations d’éducation populaire ont, elles aussi, un grand rôle à jouer dans l’accès à la culture et l’éducation à la citoyenneté.
Il n’y a pas d’égalité des chances, il n’y a qu’une égalité à promouvoir, celle de la justice, du progrès social et des droits, en un mot l’égalité républicaine.
Marie-France Glaudel
Secrétaire de Section
Secrétaire fédérale chargée du Projet et des relations extérieures
la parole aux habitants des quartiers
Etats généraux du Projet
Fédération des Vosges du Parti Socialiste
Forum citoyen : la parole aux habitants des quartiers
Plateau de la Justice Epinal
Vendredi 21 avril 2006
A un an des Présidentielles, il nous paraît important de réfléchir sur les leçons du 21 avril 2002. Aussi n’est-ce pas par hasard si nous venons au cœur du Plateau de la Justice pour donner la parole aux habitants des quartiers populaires.
Pour qu’un nouveau 21 avril ne se reproduise pas, il nous faut inventer de nouveaux rapports avec les citoyens de ces quartiers et notamment avec les jeunes, afin qu’ils se sentent concernés par la politique. La gauche et la droite, ce n’est pas pareil : après 4 ans de politique libérale, les habitants des quartiers sont oubliés et laissés à la précarité, les jeunes sont au désespoir. La réponse de la droite à la crise sociale des quartiers, c’est encore plus de précarité et encore plus de discriminations. Même si la mobilisation des jeunes est venue à bout du CPE, il reste encore dans la loi dite de l’égalité des chances : l’apprentissage à 14 ans, le travail de nuit à 15 ans, la fin de la scolarité obligatoire à 16 ans, les sanctions judiciaires et financières pour les familles les plus démunies, lorsqu’elles manifestent une incapacité à s’occuper pleinement de leurs enfants, plutôt que de donner les moyens de mettre en oeuvre les mesures d’assistance éducative en milieu ouvert.
Le projet de loi sur l’immigration choisie vient encore renforcer le désespoir des gens ; après le jeune jetable, c’est l’immigré jetable !
Nous devons reconnaître que la politique de la ville mise en place par la gauche, même si elle avait permis des réussites, n’avait pas empêché la montée des inégalités, elle avait néanmoins réussi à contenir l’explosion sociale. Depuis son démantèlement par la droite, c’est la misère, le mépris, le retour à des zones de non droit, le refoulement vers des frontières intérieures.
Que pouvons-nous proposer, à travers une politique de solidarité urbaine, pour rétablir l’égalité entre les territoires et les habitants, mobiliser les moyens nécessaires pour lutter contre les discriminations qui minent la société et promouvoir une vraie politique de solidarité et d’égalité républicaine ?
La jeunesse est une richesse et non un problème :
Les jeunes sont lucides : ils veulent être reconnus pour ce qu’ils sont et non être catalogués à cause des conduites inciviles et déviantes de certains d’entre eux, trop souvent assimilées à une origine ethnique ou une culture.
La plupart des jeunes sortis du système scolaire sans qualification en sont réduits à galérer d’une agence intérim à l’autre, sans qu’aucune mesure de formation vers un emploi stable ne leur soit offerte. Rien de concret ne ressort du projet qui remplace le CPE : Azouz Begag, qui se présente comme le « VRP de l’égalité des chances », venu comme il le dit lui-même « vendre de la diversité » à Epinal, invite les jeunes à aller chercher un emploi sur le site internet « diversité.emploi.com ». Est-ce bien sérieux et convaincant de renvoyer ainsi les jeunes à leur propre responsabilité s’ils ne trouvent pas d’emploi ? Résoudra-t-on le problème de l’emploi des jeunes et des discriminations à travers des chartes locales de diversité ou d’insertion, qui ne toucheront en réalité qu’un public restreint et trié sur le volet ?
Ce qu’il faut, c’est donner une 2ème chance aux jeunes qui ont connu l’échec scolaire, grâce à un programme de sécurité formation, en alternance débouchant sur un emploi durable. Il faut permettre à tous les jeunes d’entrer dans la vie active avec une sécurisation des parcours professionnels et leur donner, grâce à une couverture professionnelle universelle, toutes les chances de formation et de validation des acquis en cas de rupture de contrat.
Qu’ils soient sans qualification ou diplômés, les jeunes des quartiers sont victimes de discriminations à l’embauche, comme à l’entrée des boîtes de nuit.
La proposition est faite de créer une police des discriminations pour faire respecter les mêmes droits pour tous.
Lorsque l’on est victime de discriminations, il ne faut pas hésiter à saisir la HALDE, c’est-à-dire la Haute Autorité de la Lutte contre les Discriminations pour l’Egalité des chances, comme incite à le faire le Responsable de la ligue des Droits de l’Homme présent à la tribune.
Les jeunes issus de l’immigration n’aiment pas qu’on leur parle d’intégration : la plupart sont nés en France, ils sont Français, ils sont allés à l’école et veulent être traités à égalité dans leurs cursus scolaires, dans leur formation initiale et leurs parcours professionnels.
Dès lors que l’on respecte les lois de la République, que l’on a conscience de ses droits et de ses devoirs, on est intégré dans la société.
La jeunesse veut vivre, s’éduquer et travailler normalement. Elle veut s’épanouir grâce à une nouvelle politique de solidarité urbaine, ce qui mérite des moyens exceptionnels. La jeunesse des quartiers est une richesse et non un problème.
Une citoyenneté à part entière et un accès facilité à la nationalité française
Les jeunes veulent être considérés comme des citoyens à part entière et non comme des citoyens de seconde zone. Ils veulent, plus que jamais, aller voter pour la présidentielle de 2007, pour rattraper le mauvais coup du 2ème tour en 2002.
Ceux qui sont nés en France, et donc de nationalité française, seraient plus motivés pour aller voter à toutes les élections si leurs parents étrangers avaient le droit de vote aux élections locales. Accorder le droit de vote aux immigrés serait une formidable avancée vers plus de citoyenneté et une meilleure chance d’intégration républicaine. Ce serait aussi une ouverture vers la reconnaissance des droits civiques d’accès à l’éligibilité de toutes les composantes de notre société.
Ils souhaitent que les conditions d’accès à la nationalité française soient facilitées et les délais plus courts. Ils ont du mal d’accepter que cela prenne 2 à 3 ans, voire 4 ans pour des personnes qui résident en France depuis 20 ans et plus et que certaines personnes triées sur le volet soient naturalisées quelques semaines après leur arrivée sur le territoire. Ils se posent aussi des questions sur les mesures discriminatoires liées aux enquêtes et examens auxquels doivent se soumettre les postulants à la nationalité française et auxquelles devront bientôt se soumettre les candidats à l’immigration au titre du regroupement familial.
Le projet de loi sur l’immigration choisie rime avec précarité et insécurité :
Cette nouvelle loi provoque beaucoup d’inquiétudes.
Elle est injuste et inadaptée : elle durcit les conditions d’entrée et de séjour, pour empêcher les familles de se réunir et faire peser plus de soupçons sur la réalité des mariages entre Français et conjoints étrangers, elle empêche les étudiants étrangers de venir dans nos universités.
Au risque d’accroître le nombre des clandestins et au détriment du respect du droit à la vie familiale et du droit d’asile, garantis par la Constitution et la Convention européenne des droits de l’homme, le projet de loi Sarkozy parle de régularisation zéro en supprimant une disposition qui permet à tout étranger installé depuis dix ans en France de voir son statut régularisé ( 3000 personnes chaque année ! )
Quant à l’immigration choisie qu’il convient d’opposer à l’immigration subie, elle supprime en réalité le droit à une vie familiale normale, mettant ainsi en cause des droits fondamentaux. Les immigrés sont systématiquement considérés comme des exclus qui doivent faire leurs preuves. Cette immigration choisie d’une part appauvrira encore les pays d’origine en pillant leurs cerveaux et leur intelligence dont ils ont tant besoin pour se développer, et d’autre part rendra les travailleurs sans qualification taillables et corvéables à merci. Avec les restrictions sur l’obtention des titres de séjour, tant au titre du regroupement familial que du droit d’asile, le nombre des sans-papiers ne fera qu’augmenter.
Peu lui importe de créer désordre et précarité, Monsieur Sarkozy est surtout préoccupé par un souci électoraliste, il lui faut rallier les voix de l’extrême droite pour 2007.
Alors que pouvons nous proposer, si la mobilisation des socialistes et de la gauche ne parvient pas à faire reculer M.Sarkozy ? Il nous faudra retenir en 2007 une autre politique de l’immigration, selon une approche de co-développement avec les pays concernés : une immigration partagée, une immigration solidaire. Solidaire avec les pays d’origine, avec nos partenaires européens et avec l’ensemble de nos concitoyens sur l’ensemble du territoire. La France sera plus solide si elle choisit d’être plus solidaire.
Le rôle des Associations dans les quartiers populaires
La loi dite de l’égalité des chances consacre encore plus l’éclatement du Fonds d’Action et de Soutien pour l’Intégration et la Lutte contre les Discriminations (FASILD), après le démantèlement de fait du Service Social d’Aide aux Etrangers (SSAE), les deux seuls services publics qui étaient complètement consacrés à l’accueil, l’aide et l’intégration des immigrés et de leurs enfants.
La vie associative représente un terrain de lutte et d’émancipation à travers les actions d’alphabétisation, d’expression culturelle, d’apprentissage de la démocratie et de la citoyenneté, à condition qu’elle ne soit pas confisquée par les édiles locaux pour en faire un fonds de clientélisme électoral.
Elle doit au contraire donner à la jeunesse les moyens de son émancipation en valorisant les cultures populaires et urbaines, en s’ouvrant sur d’autres formes de culture, favorisant ainsi l’accomplissement personnel par la réalisation de projets collectifs divers.
Si la culture est un enjeu de politique majeure dans les quartiers populaires et si on doit donner aux associations d’éducation populaire les moyens de développer des initiatives, l’école reste le lieu privilégié de l’émancipation de la jeunesse. Aussi doit-elle être dotée des moyens nécessaires, matériels et pédagogiques pour réussir sa mission dans le cadre d’une continuité éducative avec les familles et les autres acteurs de la communauté éducative.
Retrouver confiance dans l’école de la République, être un citoyen à part entière, avoir un emploi et un logement décent, cela passe aussi par un changement de politique. Les habitants et les jeunes des quartiers l’ont bien compris, ils iront voter et leur choix politique sera déterminant pour l’avenir.
Marie-France Glaudel
Secrétaire fédérale chargée du Projet