Sunday, May 01, 2005

Quelle politique pour l'emploi?

Conférence-débat organisée par la Section Avière-Durbion du Parti Socialiste
le 29 avril 2005 à Nomexy

Non aux délocalisations : quelle politique pour L’Emploi ?


Intervention de Marie-France GLAUDEL, Secrétaire de Section et Première Secrétaire Fédérale Adjointe de la Fédération des Vosges du Parti Socialiste

Bonsoir à tous …
Je remercie Madame Colette Marchal, Maire de Nomexy d’avoir eu l’amabilité de mettre la salle des fêtes à notre disposition pour cette réunion publique.
Aussi je vous accueille ici au nom de la Section Avière-Durbion du Parti Socialiste et je remercie Christian PIERRET, Maire de Saint-Dié des Vosges et ancien Ministre de l’Industrie de nous faire l’honneur et l’amitié d’être avec nous ce soir, au cœur de cette vallée ouvrière de la Moyenne Moselle où l’Industrie textile était autrefois florissante et donnait du travail à tous.
On ne peut évoquer cette époque de prospérité qui faisait vivre ce territoire sans avoir une pensée pour ces ouvriers et ces ouvrières – ils étaient 2500 chez Boussac à Nomexy en 1961, plus de 3000 à la BTT à Thaon – tous ceux qui ont permis cette richesse par leur force de travail et dont les enfants et petits enfants font maintenant partie de la génération sacrifiée, celle pour qui aujourd’hui la réponse pour un emploi et une vie meilleure manque cruellement.
Car la préoccupation essentielle pour nos concitoyens, c’est de pouvoir vivre décemment, avoir un travail et un salaire qui leur permette d’envisager l’avenir avec confiance et espoir pour les générations futures.

La Section Avière-Durbion a voulu faire de l’emploi, de la politique d’industrialisation et de la communication avec le monde de l’Entreprise son cheval de bataille pour apporter sa contribution au projet socialiste pour 2007. Nous nous sommes donc lancés dans un travail de diagnostic afin de prendre toute la dimension des problèmes locaux.

Les derniers Boussac, il en restait alors 120, ont été congédiés en 2003, 20% d’entre eux ont retrouvé un emploi. La BTT a renvoyé ses 82 derniers ouvriers en 2003 également, parmi les reclassés il y a beaucoup de CDD et d’emplois précaires. En ajoutant les Victor Perrin à Darnieulles, et dans un autre secteur à Thiéfosse, Anne de Solène à Julienrupt et toutes les autres entreprises textiles du département, on arrive à un nombre considérable d’emplois perdus en 18 mois. De source syndicale, il reste encore 5500 emplois dans la branche textile HACUITEX dans notre département, et les chefs d’entreprises annoncent 50% de pertes dans les 3 ans à venir !
La situation est grave dans des Vosges très touchées par le chômage : plus de 10% et plus de 11% dans certains secteurs.

Je citerai aussi, localement, la fermeture de la miroiterie Favilor à Chavelot en 2004 ( 83 personnes ) et, proche de nous, la liquidation de la papeterie Matussière et Forest à Rambervillers ( près de 300 licenciements )
On a vite fait le compte au niveau du bassin d’emploi des Vosges centrales !

Et pourtant, ce secteur de la Moyenne Moselle, avec une situation privilégiée, le long de la voie expresse, est relativement protégé grâce à l’implantation d’entreprises qui sont venues vaux alentours de 1979 dans le cadre de la restructuration liée à la chute du textile. Exemple : Garret qui a permis l’installation de nombreux sous-traitants sur la zone Innova. Pour l’instant, les conditions sont bonnes, mais nous restons à la merci des actionnaires et de la concurrence roumaine et bientôt polonaise.
Nous nous portons ici un peu mieux qu’ailleurs, mais les grandes oubliées de la politique locale de l’emploi sont les femmes frappées à la fois par une discrimination à l’embauche et par l’absence de formation, alors qu’il y a chez elles une volonté très forte d’évoluer pour retrouver un travail. Les emplois de services aux autres qu’on leur propose le plus souvent nécessitent aussi professionnalisme et formation.
Ce sujet de la formation, de la formation tout au long de la vie est aussi au cœur de nos préoccupations : il faut anticiper les situations. Ainsi le Conseil Régional a mis en place un dispositif pour aider les salariés menacés dans leur emploi, leur donner accès au droit à l’information par le biais de l’insertion professionnelle et l’innovation sociale. Faire de la formation en amont en anticipant les pertes d’emploi, avec des bilans de compétences, la VAE, en parallèle avec l’ANPE, la Région, le Conseil Général, le CAPEV.

Une fois ce diagnostic établi, nous avons déjà donné notre avis et ébauché quelques propositions sur ce défi majeur, l’emploi et la politique d’industrialisation. Nous sommes attendus sur ce sujet comme sur celui des services publics et de l’Education que je ne voudrais pas oublier car elle est au cœur de notre projet de société. Les classes moyennes et les couches populaires, dont je ne veux pas exclure ceux qui sont maintenant devenus, les travailleurs pauvres, les précaires et les 515 Rmistes des cantons de Châtel et de Charmes dont le nombre va s’accentuer avec les chômeurs Boussac qui arrivent en fin de droit (dans les Vosges, on comptait 2358 Rmistes dans les Vosges en décembre 2004 ) vivent une inquiétude, une crise de confiance dans le progrès.
Et pourtant on se porte un peu mieux qu’ailleurs, dans certaines zones en désertification, notre courbe du chômage est un peu moins mauvaise, mais c’est sans compter les anciens travailleurs du textile qui sont maintenant en retraite, les femmes découragées par la recherche d’un emploi et les jeunes qui ne restent pas au pays.

Nous devons apporter des réponses claires face à la désindustrialisation à laquelle les dirigeants de droite n’apportent pas de solutions.

Nous voulons à la fois combattre la droite, dénoncer la politique de Chirac, une politique qui érige le libéralisme en doctrine, qui consiste à baisser l’impôt pour en faire profiter déjà les plus riches, à détruire notre système de protection sociale ( retraites, sécu , fin des CDI ) contrairement aux gouvernements socialistes, dont le dernier, celui auquel participait Christian PIERRET avait créé 2 000 000 d’emplois dont 400 000 grâce aux 35 h.
Ce que nous dénonçons ne se limite pas à notre canton, à notre bassin d’emploi. Nous écoutons les couches populaires et nous savons que beaucoup de gens modestes se sont sentis négligés par les gouvernements socialistes. L’emploi mais aussi les salaires, sans oublier le logement, sont des points essentiels à prendre en compte. 1million d’enfants qui vivent en dessous du seuil de pauvreté en France, est-ce acceptable quand on sait ce que cela engendre d’inégalités dès l’enfance, à l’école.

En cette année 2005 où nous célébrons le centenaire de la naissance du parti socialiste, cent ans d’idéal et d’engagement au service du progrès social et de l’égalité, la loi de séparation de l’église et de l’Etat et donc l’école laïque, obligatoire et gratuite pour les garçons et pour les filles, comment ne pas saluer aussi Louise Michel morte il y a juste cent ans aussi.
Nous lui avons rendu hommage à la fédé le 8 mars et aussi à ST DIE où la MJC Louise Michel a présenté l’exposition de sa vie. Je propose d’ailleurs que notre section fête son premier anniversaire à la fin du mois de mai lors d’une réunion conviviale au cours de laquelle nous pourrions projeter le film de cette femme qui a consacré sa vie au service de la révolution sociale pour défendre les valeurs que nous défendons encore aujourd’hui.
Elle avait eu cette phrase extraordinaire : « Il faut autre chose que la charité pour que chacun ait du pain. » Cette phrase est plus que jamais d’actualité maintenant. Si nous voulons agir pour l’égalité, il nous faut déjà avoir la volonté politique d’ agir sur l’économie, l’Etat doit en effet jouer son rôle et être plus interventionniste, à la demande du groupe de travail de notre section, contrôler les entreprises sur les aides à la création d’emplois, taxer celles qui ont recours à la flexibilité de manière excessive, ne pas laisser le MEDEF aux commandes, trouver des moyens de réguler les subventions. La puissance publique doit exercer un contrôle sur les bénéfices des entreprises et avoir droit de regard sur les licenciements et les plans sociaux.
Concernant les aides aux entreprises, la gauche devra rétablir la commission de surveillance qu’elle avait créée et que M. Poncelet a fait supprimer au Sénat. Selon des amis syndicalistes présents à ce groupe de travail : « il faut trouver de l’argent en taxant les actionnaires sur les dividendes et mener une politique volontariste pour développer l’emploi.
Concernant le textile pour lequel tout le monde monte soudainement au créneau ( y compris la commission européenne ), les nouvelles fibres textiles (Innothera) la modernisation sont porteurs ( Filature de Cheniménil ). On peut en sauver une partie grâce à l’innovation et à la recherche, en faisant des groupements d’employeurs, mais aussi en trouvant les mesures appropriées plus ambitieuses et plus volontaristes, notamment au niveau de la régulation internationale.

Nous attendons des réponses politiques en matière d’industrialisation, de recherche et d’innovation pour remédier à notre retard technologique. Il sera par ailleurs indispensable de trouver des solutions pour endiguer le phénomène des délocalisations des entreprises traditionnelles et aussi les menaces qui pèsent sur les activités de service aux entreprises.

Le véritable enjeu repose sur notre capacité à construire un projet socialiste à l’horizon 2007, à la fois ambitieux et réaliste et non un faux-semblant d’alternative qui, pour mieux s’accommoder du libéralisme viserait seulement à en atténuer les effets.

"Nous devons faire en sorte que la croissance économique et le progrès technique profitent également à tous. Pour cela il nous faut affirmer nos valeurs et notre exigence de justice par un partage équitable des progrès de la croissance, aussi bien entre le capital et le travail qu’entre les travailleurs eux-mêmes. " La démocratie ne peut être complète que lorsqu’elle est sociale.

Nous avons cent ans déjà, au cours desquels la gauche a favorisé beaucoup de conquêtes et d’avancées sociales, mais elle est loin d’avoir fini son œuvre... Rappelons-nous la formidable leçon de mai 1981 : « Là où il y a une volonté, il y a un chemin »