Pour un véritable débat militant
Pour un véritable débat militant
Comprendre le 29 mai
Les citoyens, dans les Vosges comme dans toute la France, ont massivement participé au scrutin du 29 mai, ils ont ainsi montré leur intérêt pour la construction européenne.
Les électeurs vosgiens ont dit non au Traité constitutionnel européen à plus de 59%, alors que les militants socialistes l’avaient approuvé à près de 51% lors de la consultation interne du 1er décembre 2004.
Une analyse des résultats dans chaque canton, dans les villes et les campagnes, prouve que ce non est issu des classes populaires et moyennes, alors que le oui est majoritaire dans la tranche la plus aisée de la population. Plus qu’un non de peur ou de repli, c’est un non de résistance et de courage, face aux pressions des médias et des classes dominantes.
Le vote convergent des ouvriers, des employés et des cadres moyens, du privé comme du public a montré la réconciliation d’une classe salariale unie par les mêmes intérêts et le même mécontentement face aux menace qu’elle subit.
Ce vote s’est fait sur des valeurs de gauche proeuropéennes, sociales et fédéralistes qui correspondent précisément aux exigences portées par les socialistes : plus et mieux d’Europe, dans une Union qui ne mettent pas les Etats en compétition et les salariés en concurrence, mais qui leur assure un réel progrès social.
Plus de59% de non dans les Vosges alors que les militants socialistes avaient dit oui à plus de 51%. Ce résultat doit nous interroger dans un département où notre base sociale, c’est-à-dire les couches populaires, les ouvriers, les employés, les petits agriculteurs, mais aussi les classes moyennes, voient leur statut et leur existence se dégrader.
Avons-nous, par le passé, suffisamment tenu compte de toute une série d’ interpellations démocratiques, des grèves de 1995 au suffrage populaire du 29 mai 2005, en passant par les résultats des municipales de 2001 dont nous avons bien trop minimisé la portée ? Sans oublier le terrible choc du 21 avril dont il serait irresponsable aujourd’hui de ne pas enfin tirer les leçons.
Quant au scrutin du 29 mai, il est urgent de démontrer que nous prenons enfin en compte le vote des électeurs.
Nul ne peut dire avec précision comment les adhérents du Parti Socialiste dans les Vosges ont évolué entre le 1er décembre et le 29 mai. Ont-ils voté non dans les mêmes proportions que les électeurs vosgiens ou se seraient-ils encore plus éloignés de leur base électorale à gauche ? Cette dernière hypothèse est pour le moins impensable.
Au-delà des clivages entre ceux qui ont dit oui par conviction et ceux qui ont dit non également par conviction, au-delà de leurs divergences qui portent plus sur la méthode que sur le fond, les socialistes vosgiens doivent rester unis. Il s’agit pour eux d’entendre la voix des électeurs et d’en tenir compte pour apporter des réponses politiques à des attentes populaires fortes.
Dès lors que l’on admet que le vote du 29 mai s’est fait sur des valeurs de gauche, nous devons nous rassembler sur nos exigences, européennes et nationales, afin de surmonter le décalage, s’il existe réellement, entre l’expression des militants et le suffrage universel.
Rassembler pour convaincre, vouloir un socialisme de transformation
Notre parti doit rester uni pour rassembler la gauche autour d’un projet partagé dont nous seront porteurs. Nos partenaires du monde syndical et associatif, attendent de nous des réponses à des questions précises d’une part et des choix clairs sur un projet de société d’autre part.
Ils veulent des réponses concrètes qui s’inscrivent dans un projet à long terme.
Ils attendent que l’on soit en mesure de réparer les dégâts causés par la politique de Chirac-Sarkozy. Ils attendent des réponses sur les retraites, la santé, la protection sociale, le droit du travail, l’emploi, les délocalisations notamment dans le textile et le secteur automobile, les salaires, le logement, l’éducation et la préservation des services publics. Ainsi les syndicalistes d’EDF/GDF sont inquiets sur le devenir de leur entreprise qu’ils refusent de voir privatisée, non seulement pour le maintien de leur statut dans la fonction publique, mais aussi pour que l’énergie reste sous le contrôle de l’Etat, dans le cadre du service public. Tout comme les enseignants et les jeunes des mouvements lycéens qui se battent contre la réforme Fillon ou les salariés contre d’autres réformes libérales, ils ont dépassé les revendications catégorielles pour poser le choix de la société que nous voulons ensemble, celle où la question sociale sera centrale. Tous ont compris et savent que la politique intérieures est indissociable des lois européennes et des directives décidées à Bruxelles.
Se pose alors le problème de la défiance envers les politiques et l’affirmation par leur vote du 29 mai de la volonté des citoyens à peser sur les choix politiques. Le suffrage populaire dépasse de loin un simple non à la politique gouvernementale de la droite : nous devons prendre en compte ce refus d’une politique décidée par les élites, le refus des politiques libérales, du fatalisme, de la résignation et du repli sous les contrainte des forces dominantes de la mondialisation.
Nous devons prendre en compte cette nouvelle attente à l’égard de partis politiques, plus encore à l’égard du Parti Socialiste qui représente la force essentielle d’une alternative à gauche. Il nous faudra convaincre que nous pourrons agir au quotidien sur l’emploi, sur le logement ou sur le savoir, mais il nous faudra surtout réussir à démontrer que nous sommes porteurs sur le long terme d’un projet alternatif au néolibéralisme porté par les fonds de pension américains. Nous devons réussir à convaincre qu’il y a une autre solution pour connaître le progrès que de réduire les salaires, démolir la protection sociale, en finir avec les services publics et menacer l’environnement.
Les couches populaires et les classes moyennes, vaste champ de notre électorat, ne veulent plus d’un faux semblant d’alternative qui pour mieux s’accommoder du libéralisme viserait seulement à en atténuer les effets.
Seule la voie du volontarisme peut nous permettre de combattre les méfaits du libéralisme dans le monde et les échecs de la droite en France. Le véritable enjeu de notre Congrès n’est-il pas de redonner des couleurs au socialisme et d’affirmer nos valeurs ?
Il existe une vision défaitiste et une analyse fataliste des effets de la mondialisation qui serait celle d’un socialisme de résignation face au libéralisme et à ses dégâts, d’un socialisme d’accompagnement qui voudrait simplement adapter ses valeurs aux réalités du monde et à l’économie de marché. Mais nous savons qu’il n’a pas de véritables moyens ni de véritable ambition. Cette vision pessimiste et défaitiste ne peut être la nôtre.
Préférons-lui le socialisme de transformation. Tenant compte des rapports de force dans notre société. Conscients des obstacles à franchir, nous sommes persuadés que le cours des choses pourra être modifié par la mobilisation sociale et la volonté politique.
Notre projet devra être à la hauteur des attentes de nos électeurs : il devra être à la fois crédible et ambitieux, porteur d’un vrai clivage avec la droite et d’un vrai ancrage populaire, dans la fidélité à nos valeurs de progrès, de liberté et de justice, et dans le souci de l’unité.
Refonder notre parti et faire vivre la démocratie jusqu’au bout
Le rassemblement à gauche passe par le renforcement du Parti Socialiste et la clarification de sa ligne. Les militants doivent prendre toute leur part dans la construction de l’alternative politique en s’appuyant sur l’alliance des forces politiques de gauche et du mouvement social et associatif autour d’une vision renouvelée de la politique et des luttes pour rendre à nouveau crédible une dynamique de progrès en France et en Europe.
Le Parti Socialiste dont la mission présidentielle et gouvernementale de ses représentants sera d’agir contre la précarité, l’insécurité sociale et les inégalités doit être lui-même acteur social. Il pourra alors devenir un relais politique des luttes sociales pour plus d’égalité et de justice, un relais politique des luttes sociétales pour la laïcité, l’égalité républicaine des droits et la sauvegarde écologique de notre planète , un relais politique pour une autre mondialisation et un développement durable plus juste qui préserve les biens publics.
La préparation du Congrès doit être l’occasion pour notre parti d’ouvrir largement le débat aux militants et de réduire la distance qui le sépare de plus en plus, d’élection en élection, de sa base et des citoyens.
Notre parti doit redevenir un parti fort et un parti ouvert.
Pour être un parti fort, il doit affirmer son identité, ses valeurs, ses couleurs, se définir par lui-même en choisissant une ligne claire et une orientation politique porteuse de transformation et d’espoir.
Pour être un parti ouvert, il doit être à l’ écoute de ses partenaires de gauche et du monde associatif et syndical, dialoguer, dresser la liste des convergences à valoriser et des divergences à réduire et s’associer sur le terrain autour de luttes concrètes, pour les services publics, contre les délocalisations ou les OGM, des luttes souvent difficiles autour de valeurs essentielles à préserver, nos écoles, nos emplois, notre environnement.
Notre parti doit rester uni car il est le premier levier politique de changement et la force essentielle d’une alternance crédible et d’une alternative à gauche. Face à cette immense responsabilité, son unité passe par le débat politique. Pour être novateur et convaincant aux yeux des citoyens, le Parti Socialiste doit changer son image et ses pratiques et faire vivre la démocratie en son sein.
Lors du Congrès de Dijon, nous affirmions notre ambition de devenir un grand parti socialiste, nous devions alors donner le goût de l’engagement politique aux citoyens, doubler les effectifs de nos adhérents et fidéliser notre électorat. Or, nous avons perdu des adhérents, et notre reconquête des couches populaires symbolisée par nos victoires électorales du printemps 2004 aura été de courte durée.
Au-delà du vote interne du 1er décembre, c’est le suffrage populaire du 29 mai qui doit nous interpeller. En effet que représente le choix d’environ cent mille adhérents socialistes face aux millions d’électeurs de gauche qui ont exprimé, à travers ce vote référendaire, une volonté de changement de cap face à la mondialisation libérale ?
Nous ne pouvons pas ne pas en tenir compte dans la construction de notre projet pour la France. C’est à partir de la ligne d’orientation clairement définie et choisie par des adhérents à l’écoute des citoyens, des syndicats et du mouvement associatif que nous pourrons le construire. C’est la responsabilité collective du Parti sans exclusive et non celles de quelques anciens ministres. Si nous voulons aller de l’avant, il faut savoir tourner la page.
Nous ne pourrons renouveler nos forces militantes, conquérir les jeunes, renouer durablement avec les couches populaires que si nous devenons un parti de militants. Pour cela il faut créer les conditions d’un véritable débat où seuls les choix politiques comptent. Les vraies questions devront être posées. Quel devenir pour notre parti ? Quel avenir pour la Gauche ? Quel dessein pour notre pays ? Quelle ligne d’orientation ? Quelles alliances ? Quel projet ?
La passion ne devra pas l’emporter sur la raison, ni les querelles de personnes sur les débats d’idées, ni les enjeux de pouvoir sur les choix politiques. Le Congrès du Mans sera alors réussi car il aura permis un véritable débat militant.
Un parti uni, une gauche rassemblée, un ancrage populaire, tout sera alors possible avec les Socialistes.
