A gauche pour gagner et pour changer
A gauche, pour gagner et pour changer
Par Laurent Fabius
En ce début d’année, j’adresse à chacune et à chacun tous mes souhaits de bonheur et de réussite. Je formule aussi des vœux de paix pour la planète et de sagesse pour l’humanité : elles en ont tant besoin ! Pour la France, j’espère un grand débat démocratique, une mobilisation citoyenne pour un vrai changement à gauche.
Dans 4 mois, la possibilité de l’alternance : ce sera le grand enjeu politique de 2007 ! Si, comme je le souhaite et le crois possible, la gauche gagne les élections, elle aura devant elle une tâche exaltante mais rude. L’année qui vient de s’achever offre un condensé de ces difficultés.
2006 a notamment été l’année d’une crise sociale profonde, celle du CPE. Peu qualifiés ou diplômés, beaucoup de jeunes risquaient de se voir condamnés à la précarité, interdits de CDI. Il y avait danger. Il fallait agir. Ce fut une mobilisation d’avenir, mais la question de l’emploi des jeunes n’est pas réglée pour autant.
Les désordres institutionnels ont également été notoires, l’affaire Clearstream, le fiasco judiciaire d’Outreau, les incessantes querelles au sein de l’exécutif. La vérité est que nos institutions sont fourbues. Le temps d’une République nouvelle est venu.
Les crises internationales n’ont pas manqué non plus, avec l’échec dramatique de G. W. Bush en Irak, les provocations d’Ahmadinejad en Iran, la guerre du Liban et le scandale permanent du Darfour. Là aussi, il y a un besoin vital d’équilibre, de paix, d’Europe, de France.
Pour autant, des prises de conscience utiles ont progressé. Le documentaire d’Al Gore sur le dérèglement climatique a provoqué un choc salutaire. Les impasses du capitalisme financier dans les domaines énergétique, environnemental, culturel ou social ont été spectaculaires. Une prise de conscience s’est opérée concernant le besoin de frontières européennes claires, l’urgence d’une relance fondée sur une réforme de la Banque centrale, l’adoption de règles fiscales et sociales communes pour lutter contre les délocalisations. Ces demandes, qui furent celles des partisans du Non de gauche en 2005, sont aujourd’hui reprises, du moins en paroles, par presque tous les candidats à l’élection présidentielle. Reste à convaincre nos partenaires que l’approche française n’est pas étroitement nationale, mais d’intérêt général pour l’Europe. Ce ne sera pas facile, mais ni la politique, ni la construction européenne n’ont jamais été choses faciles.
- Dans ce contexte, notre candidate, Ségolène Royal, et une majorité de gauche auront à relever de nombreux défis et d’abord celui de l’emploi et de la croissance. Depuis 2002, la France a régulièrement fait moins bien que ses partenaires en la matière. Les chiffres du chômage ne s’améliorent aujourd’hui qu’à coup de radiations administratives massives et d’emplois précaires. Lutter vraiment contre la désindustrialisation, relancer la consommation par la hausse du pouvoir d’achat, donner priorité à l’éducation et à la recherche, soutenir les entrepreneurs, les créateurs, les PME, agir pour la compétitivité de nos entreprises, mettre en œuvre une politique européenne plus favorable à la croissance : voilà notre obligation.
- Notre deuxième défi sera celui de la démocratie. Au-delà des inscriptions nombreuses sur les listes électorales, dont nous nous réjouissons tous, redonner confiance en l’action publique est indispensable. La question du régime est posée. Elle n’a pas encore été vraiment abordée à ce stade de la campagne. Les institutions ne sont pas une clause périphérique du changement, mais sa clé de voûte : plus une démocratie est vivante, plus la société et l’économie le sont aussi. Si utile soit-elle, la démarche participative ne suffira pas à elle seule à rééquilibrer les pouvoirs. Comme l’a clairement posé le projet socialiste, une République parlementaire nouvelle devra voir le jour à travers une réforme constitutionnelle ratifiée par référendum. Cet engagement devra être prolongé par un renforcement de la démocratie sociale, par une consolidation de la démocratie territoriale, par une remise à plat de la démocratie culturelle et médiatique et par la mise en place d’une vraie sécurité publique, à proximité des citoyens, à l’écoute des victimes, à l’action contre toutes les délinquances, avec des forces de l’ordre soutenues dans leur mission républicaine et non pas transformées, pour des besoins électoraux, en police anti-jeunes ou anti-quartiers.
- L’éducation sera, elle aussi, décisive. De nombreux élèves se trouvent dans une relation conflictuelle avec le « système scolaire ». Nos enseignants en viennent à douter parfois de leur mission et se sentent mal épaulés par leur hiérarchie. Nous avons besoin non d’une série de réformettes, mais d’une vraie volontéde changement, avec pour objectif de faire à nouveau de l’école publique le socle du vivre ensemble. Cela suppose de redonner confiance aux professeurs en respectant les spécificités de leur métier, de moderniser la carte scolaire, de créer un soutien éducatif gratuit après la classe, de mieux moduler l’allocation des moyens, de garantir aux meilleurs élèves de tous les établissements un accès aux filières d’excellence. Pour l’université, l’encadrement dans les premiers cycles devra être amélioré et les liens avec les grandes écoles et avec la recherche publique relancés. Quant à la laïcité, elle devra être promue, notamment par une charte pour les services publics adossée à la Constitution. Faire du prochain quinquennat celui de la laïcité renforcera la cohésion nationale contre les communautarismes et donnera à la France un rôle exemplaire face aux intégrismes.
- Aujourd’hui, le pouvoir d’achat constitue la principale préoccupation des Français. Combien de nos concitoyens, à partir du 15 du mois, ne peuvent plus faire face ! J’ai souhaité une hausse rapide du SMIC couplée à une grande négociation sociale pour que cette hausse soit diffusée aux autres salaires. En matière de logement, la réalité, c’est la pénurie de logements sociaux et l’augmentation vertigineuse des prix. Depuis déjà longtemps, on sait qu’il faudra construire massivement, remédier à la ségrégation territoriale, freiner la hausse des loyers et assurer à tous un habitat décent. J’ai proposé à diverses reprises que le droit au logement opposable soit inscrit dans nos textes et effectivement mis en œuvre. Je me réjouis qu’on avance en ce sens, même s’il faut rester vigilants car il y a loin de la proclamation à l’action. Pour assurer la solidarité indispensable, les services publics devront être défendus, à commencer par la santé - ce qui suppose un effort massif en faveur de l’hôpital. Il faudra également mieux prendre en compte la révolution du vieillissement, trouver les financements nécessaires pour nos retraites et pour une réelle prise en charge de la dépendance avec la création d’une cinquième branche de la sécurité sociale.
- Nous devrons relancer la construction européenne. On le voit chaque jour davantage, l’Europe a besoin d’une vaste réforme institutionnelle et d’un contrat démocratique passé avec les peuples. En 2008, il reviendra à la présidence française de conclure les négociations pour un nouveau traité constitutionnel. Contrairement à ce que l’on entend ici ou là, ce texte devra être soumis à référendum. Révision du mandat de la Banque centrale européenne et du pacte de stabilité, politique commune en faveur de l’innovation et de la recherche, adaptation de la politique commerciale de l’Union (avec un vrai tarif extérieur commun), stratégie industrielle qui ne se réduise pas à une application dogmatique des règles de la concurrence, défense des services publics qu’il faut protéger, conditionnement de tout nouvel élargissement à ces avancées - voilà plusieurs évolutions à enclencher. Dans le domaine social, il nous faudra engager avec ceux qui le souhaitent une politique de convergence ayant vocation, à terme, à s’étendre à toute l’Union. Sur ces sujets comme sur d’autres - en particulier, dans la perspective de bâtir une armée commune cent ans après Verdun, -, je souhaite que nous prenions des initiatives avec l’Allemagne, qui doit rester notre premier partenaire pour faire avancer l’Europe.
- Cette Europe devra jouer un rôle beaucoup plus actif en matière internationale. La dérive atlantiste que porte N. Sarkozy bloquerait l’Europe politique. Contribuer à la paix, à prévenir et à régler les conflits, faire contrepoids à la mondialisation financière, accélérer le développement des régions à l’écart, notamment l’Afrique : la liste des tâches est impressionnante. En cohérence avec ces engagements, nous devrons faire davantage entendre notre voix : refus de l’unilatéralisme, attachement au rôle des institutions internationales, promotion des droits de l’homme, du progrès social et de l’écologie planétaire. Nous devrons revoir notre stratégie d’immigration dans un sens plus solidaire et plus soucieux des intérêts à long terme de notre territoire.
- Le dernier défi que nous aurons à relever est celui de la social-écologie. C’est le grand enjeu du 21ème siècle. La France et l’Europe devront peser de tout leur poids pour de nouveaux engagements concrets en faveur de la réduction des gaz à effet de serre. Nous devrons obtenir, à terme, la création d’une Organisation mondiale de l’environnement et l’Europe organiser en son sein une nouvelle solidarité écologique, en utilisant l’outil fiscal. Une politique énergétique commune devra sécuriser nos approvisionnements et coordonner nos efforts afin de réduire l’impact écologique négatif du mode actuel de développement. Sur le territoire métropolitain lui-même, l’habitat écologique, les transports en commun, le ferroutage, les nouvelles énergies propres devront être massivement développés.
Tous ces défis montrent l’ampleur et la difficulté de la tâche. D’autant plus que, d’ici au 6 mai 2007, les obstacles politiques ne manqueront pas. La droite, laissez-fairiste dans son action, voudra faire oublier ses échecs par un flot de promesses virtuelles qu’elle présentera sous un jour social- à cet égard, N. Sarkozy n’incarne nullement la rupture avec les années Chirac. L’extrême droite cherchera à tirer un profit électoral de la pénétration de ses thèses et du populisme ambiant. Percer à jour les mensonges de l’UMP, combattre la menace FN, c’est le moins que l’on puisse attendre de la gauche républicaine qui aspire à l’alternance.
Désignée par les militants socialistes, Ségolène Royal bénéficie d’une conjoncture politique très favorable, qui doit lui permettre de remporterl’élection présidentielle et d’obtenir une majorité de gauche lors des législatives. A quatre mois du scrutin, les enjeux économiques et sociaux dominent en effet le débat public : c’est évidemment un atout pour la gauche que de pouvoir faire campagne sur ses propres thèmes. L’électorat socialiste commence à être mobilisé par le refus d’un nouveau 21 avril 2002. Des partenaires traditionnels - le PRG et le MRC - qui avaient présenté des candidatures concurrentes en 2002, seront cette fois-ci nos alliés. La situation au sein de « l’autre gauche » doit nous permettre d’enclencher une dynamique de rassemblement - qui sera d’autant plus forte qu’elle aura été d’abord pratiquée au sein du PS. Notre candidate a donc les atouts en main pour gagner. Dans ce combat, je l’aiderai et la soutiendrai sans ambiguïté, mais ne renierai pas les idées que je porte, celles du projet socialiste, de la République parlementaire nouvelle et de l’Europe sociale. Je serai fidèle à mes convictions et au choix des socialistes.
Pour convertir ce succès potentiel en victoire réelle, encore faut-il que plusieurs conditions soient remplies.
- Nous devrons être ambitieux sur les objectifs que nous poursuivons. Dans le passé, nous nous sommes souvent laissés enfermer dans un choix impossible : rendre les armes en nous faisant taxer de « libéraux » ou résister en nous faisant accuser d’archaïsme. Entre 2007 et 2012, le Parti Socialiste et la gauche ne devront pas chercher à imiter tel ou tel exemple supposé, mais inventer leur propre voie dans la mondialisation libérale et forger la gauche de demain. Nous devrons conjuguer l’égalité et la liberté, montrer que la création et la redistribution des richesses ne sont pas séparables, relever le défi de la compétition mondiale et refuser d’abandonner l’humain et la planète au laisser-faire destructeur.
- Nous devrons être précis sur les moyens que nous mobiliserons. Avec le quinquennat, le temps de l’action s’est contracté : par mandature, en général deux gouvernements d’environ 30 mois chacun. Raison de plus pour engager le changement dès les premiers jours. Concrètement, cela suppose de notre part un diagnostic partagé, des projets de loi bien préparés, des partenaires sensibilités - syndicats, élus locaux, associations -, ainsi que des décisions systématiquement assorties d’évaluation. Cela vaut aussi à l’échelon européen. Etre précis sur les outils, c’est dire en particulier comment financer. La dépense publique devra viser partout l’efficacité. La poursuite des déficits actuels, creusés depuis 2002, serait immorale et dangereuse : immorale car nos enfants ne sont pas des organismes de crédit illimité, mais les citoyens et les contribuables de demain ; dangereuse car lorsqu’un pays ne prépare plus le futur, à l’extérieur il recule et à l’intérieur seules quelques collectivités, sociétés, individus fortunés s’en sortent. Dans une politique financière ambitieuse et sérieuse, la fiscalité constitue un moyen et non une fin. Il n’est pas sérieux de promettre une baisse tous azimuts des ressources publiques, sans dire quelles actions publiques on supprimera alors qu’elles sont déjà souvent à court de moyens. Priorité devra aller au financement des dépenses d’avenir et à la maîtrise de la dette afin de garantir la compétitivité durable de notre économie et la prise en charge solidaire des grands choix de la Nation. Au cours des dernières années, la droite a distribué les cadeaux fiscaux aux plus riches tout en augmentant les prélèvements obligatoires : dès le collectif budgétaire de l’été 2007, des choix différents, plus justes et plus efficaces, devront être opérés.
- Enfin, nous devrons être clairs sur nos alliances. Qui peut croire pour la France aux vertus enchanteresses des « grandes coalitions » ? Elles gomment les clivages démocratiques, règlent rarement les problèmes, risquent d’être suivies d’une poussée extrémiste ou abstentionniste - voire des deux ! Pour mener une politique de gauche, mieux vaut s’appuyer sur les formations de gauche et le dire clairement. Faire une croix sur le rassemblement de la gauche reviendrait à faire échouer l’alternance. Il revient donc au PS, sans hégémonisme, de conduire rapidement la discussion de fond avec nos partenaires afin d’élaborer un contrat de mandature et en y associant, s’ils le souhaitent, ceux qui à gauche sont prêts à troquer la contestation systématique pour la transformation. Il ne reste pas beaucoup de temps pour le faire.
Si nous assumons ainsi nos valeurs et notre histoire tout en sachant nous tourner vers l’avenir, si nous formulons des propositions précises adaptées aux défis qui nous attendent, si nous dessinons un prolongement politique aux mobilisations sociales et aux expressions électorales intervenues depuis 2002, je suis convaincu que nos concitoyens nous écouteront et que, sans nous signer un chèque en blanc, ils nous feront confiance. En revanche, si nous hésitons sur notre identité, si nous mollissons sur nos alliances à gauche et sur notre stratégie, en préférant l’accompagnement plutôt que le changement, alors le peuple risque de ne pas se retrouver durablement dans la gauche. Car dans 4 mois, ce n’est pas seulement une élection qui se joue : c’est la capacité de la gauche à proposer un espoir à la France et une boussole à tous ceux qui refusent que le marché et l’argent dominent tout, non seulement l’économie, mais la société et la pensée elle-même. Il n’y a pas de place pour de petites querelles lorsqu’on a face à soi une aussi grande cause. Gagner ensemble cette grande cause, tel est mon souhait ardent pour 2007.
Lun, 08/01/2007 - 17:35
Le blogue de RAG
assurer le rassemblement des socialistes
Communiqué de Laurent Fabius
Les militantes et les militants du Parti Socialiste ont voté massivement et c’est d’abord à eux que je pense. Par leur participation au scrutin, par leur contribution au débat qui s’est déroulé ces dernières semaines, par leur adhésion au projet socialiste début juin, ils ont donné un exemple de démocratie. L’ensemble des Français en ont été témoins et en seront juges. De cela, nous pouvons collectivement être fiers.
Les militants ont tranché. Je salue Ségolène Royal et je la félicite pour son succès. Les militants lui ont donné tous les moyens pour l’emporter en 2007. Je lui souhaite bonne chance pour le grand combat contre la droite et l’extrême droite. Il lui revient désormais d’assurer le rassemblement de tous les socialistes. J’y suis évidemment prêt.
Je salue également Dominique Strauss-Kahn que mes vœux de sympathie et d’amitié accompagnent ce matin, face au deuil personnel qui l’a frappé.
Je remercie les 33 000 militantes et militants qui, en métropole et outre-mer, m’ont apporté leurs suffrages. Au-delà de leur vote, je les remercie pour leur mobilisation au service des idées et des propositions que nous avons portées ensemble, pour l’emploi et les salaires, pour la laïcité et les services publics, pour la réorientation sociale, économique, environnementale et démocratique de l’Europe. Qu’ils n’en doutent pas : ces combats sont justes. Ils devront être au cœur de la campagne présidentielle et du prochain quinquennat. Ils seront le ciment de l’indispensable rassemblement de la gauche.
Pour ma part, je continuerai d’agir en ce sens, car je reste convaincu que c’est la seule orientation politique capable de faire gagner durablement la gauche, les Français et la France.
17 novembre 2006
Clairement à gauche et résolument moderne
Je fais le choix de Laurent Fabius parce qu’il est clairement à gauche et résolument moderne : il saura rassembler les forces de gauche en 2007
Laurent Fabius est le candidat le plus clairement à gauche.
Il apporte des réponses concrètes aux aspirations des Français et à l’urgence sociale en faisant des propositions précises pour le pouvoir d’achat, le logement, l’éducation.
Il propose des mesures volontaristes pour l’emploi, la recherche, l’innovation et la formation.
Il est le plus en phase avec le mouvement social et le suffrage populaire car il a compris que le vrai changement passe par une résistance au libéralisme, au capitalisme financier et au système féodal des fonds de pension.
Laurent Fabius est résolument moderne.
Il est celui qui incarne la gauche du 21ème siècle, une gauche décomplexée et moderne, porteuse d’avenir.
Il veut relever les nouveaux défis en proposant des solutions nouvelles :
La sociale-écologie pour arrêter l’auto-destruction de la planète, par la taxation des pollueurs payeurs et des mesures décisives en matière énergétique
La construction d’une Europe plus sociale et plus protectrice, contre les effets dévastateurs de l’hyper-concurrence et du profit
L’émergence d’une Europe puissance indépendante, capable de ramener la paix et l’équilibre dans les régions du Monde minées par l’unitaléralisme américain.
Une France forte et solidaire pour relever les défis de la pauvreté, de l’exclusion et de l’allongement de la durée de la vie
J’entends dire que les militants socialistes doivent voter utile dès le premier tour, et qu’ils n’auraient au fond qu’une simple formalité à exercer, puisque les résultats sont déjà connus d’avance.
J’entends même dire que le Président de la République dans le cadre d’une nouvelle République n’aura qu’un rôle minime à jouer, donc pourquoi s’inquiéter ?
C’est grave, car des décisions aussi importantes que l’augmentation du SMIC, la refondation du système scolaire de la maternelle à l’université, la défense de l’école publique et laïque, la reprise en main de l’Etat sur un grand pôle de l’énergie à 100% public, le défi écologique, les mesures pour le logement, pour l’emploi, la volonté politique de résister aux dérives libérales et de s’opposer au tout marché, de mettre en place des instruments de régulation au niveau européen, la relance de la construction européenne, toutes ces questions relèvent avant tout de la volonté politique du chef de l’Etat élu au suffrage universel et les décisions importantes ne se prendront pas autour d’une table entre partenaires sociaux et MEDEF, ni au sein d’un jury citoyen, ni au sein des Régions, pas plus qu’elles ne se règleront pas par le contrat. Non ! Le contrat ne remplacera jamais la loi et la Région ne remplacera pas l’Etat.
Les décisions politiques importantes seront impulsées par le Président de la République élu au suffrage universel pour mener une politique en phase avec las aspirations des citoyens, une politique relayée par un Premier ministre responsable devant le parlement et par les parlementaires qui proposeront des lois à partir des propositions du projet socialiste adopté par les militants, enrichies et approfondies de manière à être encore plus en phase avec les demandes de ceux de leurs concitoyens qui sont les premières victimes de la politique chiraco-sarkozienne.
La république parlementaire nouvelle nous l’appelons tous de nos vœux. Quant à la démocratie participative, ce n’est pas une idée nouvelle puisque nombre d’élus PS la pratiquent déjà, et ce n’est certainement pas un vaste fourre-tout où chacun trouvera son compte. On ne peut substituer la satisfaction des intérêts égoïstes et individuels à l’intérêt général. Donc ni surveillance des élus à travers des jurys populaires, ni régime présidentiel, mais renforcement des pouvoirs du parlement et redéfinition du rôle et de la mission des députés qui représentent le peuple. Le parlement doit aussi se doter des outils nécessaires pour veiller à l’application des lois et à évaluer leur efficacité.
En cela la réforme de l’Etat devra aussi redéfinir le rôle et la fonction des hauts fonctionnaires car les « citoyens experts » ne remplaceront jamais les énarques, les chercheurs et les experts. Il faut plutôt s’attaquer au problème de leur recrutement et ouvrir cette formation aux catégories populaires. Redonner le pouvoir aux citoyens c’est aussi leur donner leur place dans les grandes écoles en installant des classes préparatoires à l’intérieur de l’université. Recruter pour les grandes écoles à l’université, là où vont les enfants du peuple.
Chacun sait aussi que plus d’autonomie pour les chefs d’établissement, le dynamitage ou la régionalisation des universités, c’est la privatisation annoncée, c’est la fin des diplômes nationaux et je ne veux pas parler du statut des enseignants…Puisqu’il flotte une vague idée dans l’air du temps selon laquelle, pour être bien vu, il faudrait s’attaquer au corps enseignant !
La question de la désignation de notre candidat ou candidate doit sortir du cadre des sondages et des médias, la vraie question ne s’arrête pas au choix du 16 novembre, la vraie question, c’est qui sera le mieux placé pour l’emporter contre le droite en 2007 ?
C’est celui qui fera l’unité des socialistes autour du projet socialiste …
L’unité des socialistes autour de leurs valeurs
Celui qui portera la voix du socialisme assez fort pour que les recalés, les exclus, les précaires, les travailleurs pauvres se reconnaissent et redeviennent des citoyens à part entière.
C’est celui qui réussira à faire du Parti socialiste le talisman de l’unité autour duquel se rassembleront la gauche et les humanistes de progrès parce qu’ils auront compris que l’avenir passe par la réconciliation des deux France, de ceux qui souffrent et ceux qui réussissent !
C’est Laurent Fabius !
Il faudra rassembler le plus de voix à gauche dès le premier tour des présidentielles en 2007 en donnant envie aux électeurs de voter utile, et ensuite faire plus de 50% au deuxième tour. Je voudrais mettre en garde contre l’idée que pour gagner il faudrait plutôt chercher des voix à partir d’un nouveau discours sécuritaire et flatteur des individualismes, des égoïsmes et des bas instincts, mais ces voix gagnées ne remplaceront jamais toutes celles perdues à gauche.
OUI ! Laurent Fabius se place en éclaireur de l’unité des socialistes et du rassemblement de la gauche de l’an 2000, face à des choix décisifs pour la France, l’Europe et le Monde.
Courageux par sa volonté politique face aux grands défis de la France et du Monde du 21ème siècle, réaliste par sa profonde connaissance du monde économique et juste par sa vision éclairée des questions internationales, il est celui qui saura rendre à notre pays les couleurs de la République, son modèle social et son rayonnement universel.
Marie-France Glaudel
Membre de la commission nationale de contrôle financier
Secrétaire fédérale
Secrétaire de section
Candidate aux législatives de 2007 dans la première circonscription des Vosges
Avec Laurent FABIUS refusons le fatalisme : un autre avenir est possible
"Un autre avenir est possible.Contre la société précaire, construisons une France forte et solidaire."
pour l’Europe, l’international et l’écologie.
Chère camarade, cher camarade,
Si la mondialisation continue au rythme actuel, dans dix ans, le monde sera encore plus libéral, donc encore plus inégalitaire, et l’environnement encore plus dégradé. Les conflits se multiplieront : pour la puissance, pour l’énergie, pour l’eau, pour l’accès aux médicaments, pour fuir les cataclysmes liés au réchauffement climatique. Le monde libéral est un monde violent.
Ma conviction, c’est que cette perspective n’est pas une fatalité. Sur tous les continents, des femmes et des hommes aspirent à construire un monde plus humain et plus solidaire. Si la France se range clairement à leurs côtés, prolongeant la bataille pour l’Europe sociale et la lutte contre le CPE, alors nous aiderons à faire pencher la balance ! À l’inverse, une victoire de la droite et de Sarkozy ferait basculer l’équilibre en ancrant notre pays dans le système libéral dominant. Voilà pourquoi l’élection de 2007 est décisive et pas seulement pour les Français. Il reviendra au prochain Président de la République et à la nouvelle majorité de remettre la France à la tête du camp du progrès.
Cela suppose des choix volontaristes pour une Europe sociale, une mondialisation solidaire et une écologie active. Et non une gauche blairiste qui, à force d’intérioriser les contraintes du libéralisme, s’en fait le défenseur.
On me dit parfois que j’ai changé. Évidemment ! Certes, mes valeurs sont restées les mêmes - l’égalité, la laïcité, la liberté, l’internationalisme, en un mot, le socialisme -, mais j’ai adapté un certain nombre de mes positions aux bouleversements du monde. Ceux qui ne le font pas vivent sur une autre planète. Si on veut construire l’avenir - et pas simplement le « désirer » - l’heure n’est pas aux à peu près. Le capitalisme financier transnational ne fait pas dans la demi-mesure. Sans détermination farouche de notre part, il ne connaîtra pas de limites.
1) En Europe, nous tiendrons bon sur notre objectif : l’Europe sociale.
Nos partenaires, prenant acte du « non » français, ont décidé qu’il reviendrait à la France de présider l’UE au moment de conclure la renégociation du Traité constitutionnel. Ce Traité devra être court, se recentrer sur les institutions et les valeurs et faciliter notamment les coopérations renforcées pour permettre l’Europe des « trois cercles ». Je m’engage à soumettre aux Français par référendum ce nouveau texte.
Pour réorienter et relancer l’Europe, outre la construction d’une armée européenne par la mise en commun de nos équipements et de nos industries - et d’abord à l’échelon franco-allemand -, nous devrons attaquer plusieurs grands défis, bien définis dans notre projet socialiste.
• La politique monétaire qui suppose une révision des orientations de la BCE.
• Les délocalisations intra et extra-européennes : il y a urgence à adopter un traité d’harmonisation sociale et fiscale.
• La préparation de l’avenir : elle passe par un budget renforcé pour investir dans la recherche, la politique énergétique commune, les réseaux de transport, etc.
• La défense des services publics qu’il faut protéger, en particulier par une directive. Pour donner plus de force à nos demandes, je subordonnerai tout nouvel élargissement à ces avancées.
2) Pour une mondialisation solidaire, nous fixerons comme objectif le juste échange au lieu du libre échange.
Je proposerai à nos partenaires européens une utilisation stratégique du tarif extérieur commun. La France ne ratifiera aucun accord commercial qui ne comprendra pas de garanties sociales et environnementales.
Nous ferons du « partenariat pour le développement » une priorité, et d’abord en direction de nos frères et soeurs d’Afrique. Nous devrons prévoir des financements innovants. Pourquoi pas, au-delà de l’augmentation de l’aide et de l’annulation des dettes, une taxe sur les ventes d’armes, comme je l’ai déjà évoqué ?
Les organisations internationales (ONU, FMI, OMC, Banque mondiale) devront prendre en compte pleinement cette mondialisation.
3) Nous mettrons l’écologie et le développement durable au coeur de nos politiques publiques, du local au global.
Nous proposerons la création d’une Organisation mondiale de l’environnement. Je proposerai à l’UE l’adoption d’une véritable fiscalité écologique fondée sur le principe pollueur-payeur. En France, nous créerons un service public de l’environnement doté de pouvoirs étendus, placé sous l’autorité d’un ministre du Développement durable qui sera le numéro 2 du gouvernement. Les économies d’énergie, l’habitat écologique, la diversification énergétique, le ferroutage et les transports collectifs, en lien avec les collectivités locales, seront des priorités budgétaires. La mise en concurrence du marché de l’énergie sera suspendue. EDF et GDF repasseront sous contrôle public.
Stop ou encore au libéralisme, voilà le sens de l’élection de 2007 et du vote militant les 16 et 23 novembre prochains. Des millions de femmes et d’hommes, en France, en Europe et dans le monde, subissent la précarité. Ils veulent trouver une issue pacifique et efficace. Cette issue s’appelle le socialisme. C’est pour le faire triompher face à la mondialisation et à la marchandisation que je suis candidat.
Laurent Fabius
Réponses aux questions des militants
Christophe CAVAILLES (Haute-Garonne)
Géopolitique, prolifération, nucléaire, terrorisme : quelles solutions préconises-tu pour rendre efficace la non-prolifération nucléaire ? Quelle position adopter à l’égard de l’Iran, du Pakistan et de la Corée du Nord ? Quelle sortie de crise pour les conflits en Afghanistan, en Côte-d’Ivoire, dans la région des Grands Lacs, en Somalie et au Moyen-Orient ?
L’affaiblissement du traité de non prolifération est inquiétante. Réaffirmer sa validité, cela veut dire donner toute garantie que l’on ne contourne pas ce traité, ce que fait l’Iran aujourd’hui. Cela veut également dire que l’on applique toutes ses dispositions, y compris la maîtrise du cycle nucléaire civil, dont l’Iran a le droit de se doter. Ceci dit, il faut renforcer les contrôles de l’AIEA sur l’Iran. Réaffirmer le traité de non-prolifération, cela veut dire aussi que les puissances nucléaires s’engagent à appliquer l’article 6 du traité pour aller vers un désarmement.
Face à l’Iran et à la Corée du Nord, il faut pratiquer une politique à la fois de la fermeté et d’incitation. Je crois juste de privilégier les sanctions qui frappent directement les dirigeants : entrave aux déplacements internationaux et gel des comptes à l’étranger en particulier. C’est ce que j’ai réclamé notamment pour le président Ahmadinejad, qui tient des propos totalement inacceptables à l’égard d’Israël.
Dans le même temps on ne pourra convaincre les États d’écarter la prolifération s’il n’y a pas aussi une incitation. En matière de développement économique et de sécurité, il faut reprendre les discussions à six avec la Corée du Nord (Corée du Sud, Chine, Japon, États-Unis, Russie, Corée du Nord). Comme cela avait été fait dans les années 90 à l’initiative de l’administration Clinton, je souhaite que l’on prenne en compte les besoins énergétiques de la Corée du Nord, ce qui peut la convaincre d’évoluer quant à ses ambitions de nucléaire militaire.
Enfin, l’Europe doit faire davantage entendre sa voix, notamment par rapport aux Etats-Unis, dont la politique contre les « Etats voyous » s’est avérée très inefficace.
Jacqueline HOIBIAN (Drôme)
Dans le conflit israélo-palestinien, quelle sera la position de votre gouvernement ? Respect des deux peuples ? Condamnation des colonies ? Quelle aide pour favoriser un processus de paix juste ?
Ma position est en droite ligne des deux principes posés par François Mitterrand, dans son discours à la Knesset : la sécurité pour l’État d’Israël, « l’irréductible droit de vivre pour Israël et son peuple », le droit des Palestiniens à un État viable qui ne soit pas d’emblée condamné par sa géographie. Il doit en résulter la reconnaissance mutuelle des deux États, l’évacuation des colonies illégalement implantées en Cisjordanie, le respect des frontières de 1967, sauf arrangement possible de sécurité. Jérusalem devrait être doté d’un statut assurant la coexistence des religions et des deux capitales.
Pour relancer le processus de paix, la bonne méthode est le dialogue entre les protagonistes, États et mouvements disposant d’un appui dans la population. Il ne s’agit pas de cautionner des positions inacceptables, mais de prendre en compte les résultats des consultations électorales et, à travers cet échange, de favoriser une meilleure compréhension. Car il n’y aura pas de solution au Proche- Orient autre que politique. La France, pays ami des Israéliens et des Palestiniens, a un rôle de premier plan à jouer. Ceci dit, en tant que président de la République, qui représente une autorité morale, je ne recevrai pas les dirigeants du Hamas tant qu’il n’y aura pas eu une évolution de sa part vers la reconnaissance d’Israël. Les contacts devront avoir lieu au niveau diplomatique. Il est également souhaitable que nous parvenions à une plus grande implication de l’Union européenne et du Quartet. Nous ne devons pas laisser les Israéliens et les Palestiniens sans médiateurs ni réel contrepoids face à la politique américaine.
Benoît MARTIN (Ille-et-Vilaine)
Le programme socialiste est très discret sur les questions militaires. Quelle est votre position vis-à-vis de l’OTAN ? Quelle stratégie voulez-vous mener vis-à-vis de l’Europe de la défense ?
Je privilégie l’Europe de la défense. Pour convaincre nos partenaires européens d’y participer pleinement, nous ne la construirons pas contre l’OTAN, mais de façon autonome vis-à-vis d’elle. C’est parce que je souhaite cette autonomie que j’avais notamment récusé l’inscription dans le Traité constitutionnel européen d’une soumission de la défense européenne à l’OTAN.
Comment relancer l’Europe de la défense ? Un livre blanc sur la défense européenne est d’abord nécessaire au-delà de la stratégie de sécurité adoptée en 2003. Il faut aussi que nous fixions comme principe l’intégration de nos armées qui doivent disposer le plus possible des mêmes matériels. Cela permettra de renforcer notre défense tout en dégageant des économies nécessaires. Nos amis allemands devraient être sollicités en priorité. Je l’ai répété : une grande ambition, c’est une armée franco-allemande un siècle après Verdun, à l’horizon 2016. Elle peut être le prélude à une armée européenne. Le président du SPD a proposé récemment de créer une armée européenne indépendante de l’OTAN. J’approuve cette idée. L’Europe a besoin de grands projets. La défense européenne et l’armée franco-allemande sont de grands projets. Quant à l’Alliance atlantique, nous en sommes membres, nous devons veiller à ce que l’OTAN ne se substitue pas de plus en plus à l’ONU pour des interventions tous azimuts sous direction américaine.
Pierre DEDET (Cher)
De quelle manière comptez-vous tenir compte du refus du Traité constitutionnel européen exprimé par les Français en 2005 ? Pensez-vous favoriser la construction d’une Europe plus sociale ? De quelle manière ?
Prendre en compte le vote majoritaire des Français, c’est d’abord le respecter.
Cela signifie deux choses, bien exposées dans le projet socialiste. D’abord, le prochain président de la République devra chercher à relancer et réorienter l’Europe sur la base de ce vote. Nous adresserons à nos partenaires plusieurs propositions : doter l’Europe élargie d’un Traité social, d’une directive cadre sur les services publics et d’un vrai budget de solidarité ; revoir la politique commerciale et de la concurrence de la Commission européenne, dans un sens favorable à nos industries, ce qui appellera un renforcement du tarif extérieur commun ; réorienter le pilotage de la zone euro en révisant les objectifs de la BCE, en assouplissant le pacte de stabilité et en lançant une démarche d’harmonisation fiscale, préfiguration d’un véritable impôt européen ; élaborer un nouveau Traité constitutionnel, centré sur les valeurs et les institutions.
Je soumettrai au vote des Français ce nouveau texte. M. Sarkozy propose, lui, un « mini-Traité à ratification parlementaire ». J’appelle cela unemaxi-imposture. Certains socialistes semblent hésiter et renvoyer à plus tard le chantier institutionnel. Pour moi, c’est clair : la Constitution sera au menu de la présidence française au second semestre 2008, et le peuple doit avoir le dernier mot.
Quant à l’élargissement, je ne pense pas qu’on puisse accepter un nouvel élargissement de l’Union européenne tant que celle-ci ne se sera pas dotée du Traité social et de la Constitution que propose notre projet. Je ne suis ni pour l’Europe à 50 ni pour l’Europe par la preuve, mais pour l’Europe par la Gauche, dans la fidélité à ce qu’ont demandé les Français.
Catherine JACQUEMOT (Hauts-de-Seine)
La coopération avec l’Afrique est essentielle pour notre pays, pas seulement au titre de la solidarité avec les populations africaines, mais aussi parce que ce qui s’y passe est crucial pour notre avenir : émigration, sécurité, risque sanitaire, risque écologique... En matière de coopération, dites-nous ce que vous voulez faire, annoncez que nous respecterons nos engagements internationaux.
Je voudrais dire, tout d’abord, que je regrette beaucoup que nous n’ayons pas évoqué l’Afrique lors de notre débat télévisé. Comme tu le sais, je me suis rendu au Sénégal et au Mali cet été [cf. www.laurentfabius. net] et j’ai déjà annoncé que si je suis élu, mon premier déplacement hors d’Europe sera pour l’Afrique. La France a des devoirs à l’égard de l’Afrique et pour nous, l’Afrique est une chance et certainement pas un fardeau. Je partage pleinement ton avis : l’avenir de l’Afrique, c’est aussi le nôtre. La santé, l’environnement, la sécurité de l’Afrique nous concernent directement. Je refuse « l’immigration choisie » du ministre de l’Intérieur qui constitue souvent une insulte pour les populations d’origine africaine.
J’ajouterai à ta liste la croissance. Face aux dégâts de la mondialisation financière, ce n’est qu’en stimulant la croissance en Afrique, au moyen d’une politique ambitieuse de co-développement, de construction d’infrastructures, de juste échange, de développement des entreprises locales, de maîtrise de la démographie qu’un avenir meilleur pourra être proposé aux populations d’Afrique. Loin des pratiques douteuses de la « Françafrique », c’est la voie pour parvenir à un rééquilibrage entre les deux rives de la Méditerranée.
S’agissant du montant de notre aide publique, notre projet fixe comme objectif 0,7 % du PIB, en privilégiant l’éducation, la santé et les infrastructures. Ce sera un effort considérable, dans un contexte budgétaire difficile. Il faudra que nous le tentions.
Pour de propositions efficaces et solidaires, contruire l'avenir avec Laurent FABIUS
La crise des banlieues souligne le besoin de République
9 novembre 2006
Le critère du succès de mon mandat sera celui-ci : je veux qu’à son terme, les jeunes se disent : « si nous le voulons, notre vie sera meilleure que celle de nos parents ».
Interview de Laurent Fabius :
Comment vivez-vous cette campagne, coincé entre DSK, le social-démocrate, et Ségolène Royal, la madone des sondages ?
Je suis à l’aise parce que je suis, moi, tout simplement socialiste. De plus en plus de militants soutiennent ma candidature parce que je suis le seul à revendiquer clairement le socialisme et le rassemblement de la gauche. Les lignes sont en train de bouger !
Estimez-vous être le meilleur rassembleur de la gauche ?
Je le pense. On ne rassemblera pas la gauche sur l’idée, défendue par mes deux camarades, que l’on va « dynamiter » les universités en les privatisant ou en prônant l’« encadrement militaire » des jeunes. Ce qui unit la gauche, ce sont des positions de gauche, efficaces et solidaires : l’amélioration du pouvoir d’achat et du logement, la lutte contre les délocalisations, la laïcité, les services publics, la République parlementaire nouvelle, l’Europe sociale, l’écologie active. C’est le chemin que je propose pour 2007.
Faites-vous souvent référence à François Mitterrand quand vous agissez ?
Oui, je me reconnais dans plusieurs de ses traits depuis longtemps : la volonté, la lutte contre les injustices, la conviction européenne. Mais aussi l’amour des Français et une idée élevée de la France
La crise des banlieues ne signe-t-elle pas l’arrêt de mort de notre modèle républicain et le début d’un communautarisme à l’américaine ?
Elle souligne au contraire le besoin de République. En France, nous séparons la foi et la loi. Prenons garde de ne pas gâcher cette chance exceptionnelle qui s’appelle la laïcité. Cela suppose aussi de vraies réponses pour les banlieues. Lutter contre les ghettos, encourager l’emploi et ne plus entasser les gens dans des logements indignes. Pour cela, j’ai proposé, par exemple, quesi un maire ne respecte pas l’obligation des 20 % de logements sociaux, le préfet se substituera à lui pour les construire. En matière d’éducation, je suis favorable au renforcement de l’encadrement scolaire dans les quartiers difficiles. Il faut aussi lutter contre les discriminations. Et, bien sûr, assurer la sécurité sans aucun angélisme.
Comment qualifiez-vous les incendiaires du bus de Marseille, et que préconisez-vous pour ces délinquants ?
Ce sont des voyous qui n’ont rien à voir avec l’écrasante majorité des jeunes des quartiers. Pour ces jeunes délinquants, il faut des sanctions très fermes, d’ailleurs prévues par la loi, qui peuvent aller jusqu’à la prison. Cela dit, celle-ci doit rester le dernier recours. C’est souvent une école de la récidive. Il faut plutôt envisager une mise à l’écart, dans des établissements fermés hors du quartier d’origine, avec un suivi pour la réinsertion. Nous devons éviter de créer un affrontement permanent entre la société et les jeunes, entre la police et les jeunes.
Si vous êtes élu, comment sera la France à la fin de votre mandat, en 2012 ?
Ce sera une France qui aura relancé l’emploi, investi dans l’avenir - recherche, innovation, éducation, formation. Nous aurons réorienté la construction européenne face à la mondialisation financière. Nous aurons retrouvé dynamisme et espoir. Actuellement, beaucoup de jeunes se disent que leur situation sera moins favorable que celle de leurs parents. Le critère du succès de mon mandat sera celui-ci : je veux qu’à son terme, les jeunes se disent : « si nous le voulons, notre vie sera meilleure que celle de nos parents ».
Que répondez-vous à ceux qui vous accusent de démagogie ?
Je réponds que je ne considère pas qu’augmenter de 8 % le salaire de personnes qui gagnent 1 000 euros nets par mois ou revaloriser les pensions soit de la démagogie ! En tout cas, quand on est de gauche.
La France a-t-elle les moyens de ses réformes ?
Il faudra notamment revenir sur les cadeaux fiscaux de plusieurs milliards consentis aux plus aisés par la droite, ainsi que sur les allègements de charges accordés aux très grandes entreprises et qui n’ont aucune efficacité pour l’emploi.
Pensez-vous que DSK et Ségolène Royal soient armés pour faire face à ces difficultés ?
Ce sont des personnalités de talent, mais pour redresser notre pays, il faudra une approche plus volontaire et plus novatrice que la social-démocratie édulcorée ou que le blairisme régionalisé. Quant à l’international, lorsqu’on va discuter avec un démocrate aussi exquis que le Président iranien M. Ahmadinejad, mieux vaut avoir beaucoup d’expérience. Même chose pour l’Europe dans un tout autre contexte, quand il faudra renégocier la Constitution avec nos partenaires.
Qu’est-ce qui vous différencie de vos concurrents socialistes ?
Je refuse la fatalité. Et la confusion entre communication et politique.
Déplorez-vous cette tendance ?
Un responsable politique doit apporter des réponses précises et avoir le courage de ses convictions. Quand un citoyen, une association, un syndicat, vous demande : « Qu’est-ce que vous pensez de ce problème », si votre réponse est : « J’allais vous poser la même question », c’est un peu court ! Et, je le crains, dévastateur à terme.
Qu’allez-vous faire pour être au second tour ?
Je vais continuer les déplacements sur le terrain, les interviews dans les médias et les débats. Ma démarche ne variera pas : toujours revenir aux questions de fond et appeler les militants socialistes, anciens ou récents, à voter librement.
Et si vous ne l’êtes pas, pour qui appellerez-vous à voter ?
Je ne me place pas dans cette hypothèse. J’agis pour gagner.
Comment expliquez-vous que vous ne décollez pas dans les sondages ?
C’est un faux problème. Celui qui sera désigné par le PS partira mécaniquement avec environ 50 % de popularité puisqu’il sera perçu comme le champion de la gauche. C’est ce qui s’est produit en 1981 avec François Mitterrand et en 1995 avec Lionel Jospin. Avant leur désignation par les militants, ils avaient des scores modestes. Leur désignation les a placés automatiquement au premier rang. La question n’est donc pas de savoir qui est en tête dans les sondages, mais qui est capable, à partir d’un même point de départ, de monter et de ne pas descendre. Là, ce n’est plus affaire de sondage ou de marketing, mais de ligne politique.
Etes-vous inquiet du déroulement du vote interne au Parti socialiste ?
Quand je vois tel responsable de département ou de région annoncer chez lui, avant le vote, des scores à la nord-coréenne pour une candidature, je m’interroge. Je crains que, dans les derniers jours, on veuille forcer la main des militants : j’espère qu’ils sauront rester libres.
Peut-on imaginer que vous soyez candidat en dehors du PS si vous n’êtes pas investi ?
Non.
Que ferez-vous si vous êtes désigné ?
En lien avec la direction du PS, j’engagerai des discussions avec nos partenaires politiques pour bâtir un contrat de majorité. En décembre et janvier, je ferai le tour des capitales d’Europe et des principaux pays du globe pour dire ce que sera la France du vrai changement. A partir de février, je mènerai campagne sur la double mission qui sera la nôtre : répondre à l’urgence sociale et construire l’avenir. Je me préparerai à ma tâche. Je veux être le Président du vrai changement.
Pour une alternative de progrès, une politique résolument moderne et une France à l'avant-garde
Ségolène Royal semble toujours la favorite et Dominique Strauss-Kahn son challenger. Croyez-vous toujours pouvoir vous imposer ?
Bien sûr ! Est en train de se former autour de ma candidature un vaste rassemblement de militants de sensibilités diverses qui souhaitent que notre candidat défende vraiment le projet socialiste et s’engage pour une alternative politique claire à la mondialisation libérale en tirant toutes les leçons de l’expérience. Les débats commencent à briser le bruit médiatique et l’enfumage sondagier. La gauche, c’est la liberté de penser, pas le bourrage de crâne ! Un an avant l’élection de 1981, François Mitterrand - j’étais alors son jeune collaborateur - n’était pas en tête dans les enquêtes d’opinion. Mais il a tenu bon et défendu ses convictions. J’en fais de même et j’ai bon espoir de gagner.
Vous avez été le plus pugnace lors du dernier débat. Très Mitterrandien. Mais vous semblez incarner un Président “à l’ancienne”, alors que Royal et DSK semblent plus “modernes”...
N’est-ce pas plutôt l’inverse ?
Elire un président, c’est choisir une personnalité, mais c’est avant tout vouloir un projet politique.Or, le projet que je défends est le seul à dire pourquoi et comment relever les défis du futur, défi écologique, celui de l’éducation, celui de l’allongement de la durée de la vie, celui de la relance et de la réorientation européenne. Si je suis élu, je proposerai une République parlementaire nouvelle. Mes deux camarades ont une vision nettement plus présidentialiste. Même relooké « moderne », un monarque à l’Elysée reste un monarque... A mes yeux, le Président doit cesser d’être le dirigeant irresponsable qu’il est aujourd’hui, exprimer le long terme, défendre les valeurs républicaines, ne pas court-circuiter le Parlement et le Premier ministre. Il doit savoir anticiper, résister, connaître et aimer la France et les Français. C’est mon cas. Et c’est tout à fait moderne.
Peut on dire que Royal, c’est la participation, DSK la négociation et vous la loi ?
Ce serait une caricature ! Je crois à la démocratie participative, à condition qu’elle soit au service des citoyens et pas une simple opération de communication. Je crois aussi au contrat - je l’ai d’ailleurs souvent pratiqué dans les fonctions que j’ai occupées. Mais par expérience, je sais que la loi peut protéger et l’absence de loi asservir. C’est une vision superficielle de la société de penser que, parce qu’on va asseoir les syndicats et le Medef face à face, les salaires vont augmenter comme par enchantement. S’il n’y a pas un gouvernement de gauche qui avance des objectifs et utilise les instruments à sa disposition, rien de positif ne se passera pour les salariés, ni pour les petits entrepreneurs d’ailleurs. Avec la mondialisation financière et une société minée par la précarité, plus que jamais l’impulsion et le cap doivent venir du politique !
À plusieurs reprises, vous avez accusé Ségolène Royal de "faire le lit de l’extrême-droite". La trouvez-vous dangereuse ?
Nous sommes tous membres du PS et je veille à ne pas attaquer mes compétiteurs. Plutôt que de chercher à développer un contre-projet au moyen d’un concours Lépine des idées choc, parfois peu réalistes, parfois inefficaces, pour moi l’idée la plus nouvelle, c’est d’appliquer le projet socialiste qui seul peut rassembler la gauche, rassemblement qui conditionne la victoire. Les militants n’ont pas voté pour une copie du programme de Tony Blair... Et quand ces idées ont été présentées au congrès du PS, elles ont fait 2 % !
Les idées de Ségolène Royal sur les camps militaires ou les jurys populaires marquent-elles un point de rupture par rapport aux valeurs de gauche ?
Je doute que ces positions permettent de rassembler la gauche. Ne relèvent-elles pas surtout d’une stratégie de communication ? Il s’agit, après un sondage et avant un débat télévisé, de rendre publique une idée pour susciter une controverse dans l’opinion. Si ça accroche on continue, si ça décroche on fait marche arrière et on change de thème. L’encadrement militaire des primo-délinquants devient un encadrement humanitaire. Vous croyez que l’armée a les moyens d’encadrer 48 000 jeunes ! Quant au Conseil des ministres, si vous le rendez public, vous en faites une scène médiatique, c’est-à-dire le contraire de ce qu’il doit être : un lieu de travail et de délibération.
Ségolène Royal a l’argument d’être une femme...
C’est incontestable ! Je suis à 100 % pour que les femmes aient un rôle beaucoup plus important notamment en politique et je crois être le seul à avoir proposé que le gouvernement soit strictement égalitaire entre les femmes et les hommes. Mais je ne crois pas que l’on détermine son vote uniquement en fonction du sexe.
En quoi êtes-vous meilleur pour battre Nicolas Sarkozy, lui aussi très fort pour susciter le débat ?
Je le battrai en me situant sur les terrains concrets de préoccupation de l’électorat populaire et des couches moyennes : le pouvoir d’achat, le logement, l’éducation, la santé, les services publics - dont la sécurité fait partie. En répondant aussi aux grands problèmes qui sont devant nous.
Sous Jospin, vous étiez perçu comme un Tony Blair français. Comment croire à votre revirement antilibéral ?
Après le séisme du 21 avril 2002, après Le Pen au 2ème tour de la présidentielle, après les bouleversements de la mondialisation financière, après les gravissimes menaces écologiques, si vous n’adaptez pas votre logiciel, c’est que vous vivez sur la planète Mars ! Je garde les valeurs qui ont toujours été les miennes, mais sur certaines solutions, j’ai évolué, je l’assume, et je ne crois pas un instant qu’on puisse arriver à redonner une perspective de progrès avec une vision tiède de la gauche. Le discours de gauche est régulièrement dénigré comme étant « archa ïque », comme si les valeurs de gauche étaient d’un autre temps. Des mesures rétrogrades deviennent des « remises en cause courageuses » ! Et bien, moi, j’appelle un chat un chat. Je revendique une gauche décomplexée.
On a le sentiment que des passerelles se créent entre vous et DSK. Y aura-t-il un accord de désistement ?
J’apprécie ses qualités, mais il y a aussi des points de divergences. Je pense que la gauche doit porter un changement plus important que la « social-démocratie » à l’ancienne. Quelle est la réponse social-démocrate à la mondialisation ? La transformation ou la résignation. A ce stade du débat, on ne sait pas vraiment.
Alors que les Allemands ont décidé de passer l’âge de la retraite de 65 à 67 ans, le PS veut la maintenir à 60 ans. N’est-ce pas irresponsable ?
Ce droit doit être maintenu, mais le système actuel n’est pas financé et il est injuste. La loi Fillon aboutit à des pensions trop faibles, en particulier pour les femmes qui ont accompli des carrières courtes. Il faudra trouver de nouvelles recettes, tenir compte de la pénibilité et fixer une retraite minimum. Tout cela demandera une vaste négociation. Nous devrons ouvrir cette discussion rapidement.
Des entreprises chinoises rachètent des pans de notre industrie, comme Rhodia à Lyon. Faut-il s’inquiéter du développement de la Chine, ou se réjouir de le voir sortir du tiers-monde ?
Les deux ! Mais le problème, c’est l’absurdité de la politique européenne de concurrence. Et la faiblesse de notre politique commerciale, industrielle, monétaire et de recherche. Lorsque les États-Unis n’ont pas voulu que les chinois achètent une de leur société pétrolière, ils l’ont empêché. Lorsqu’ils souhaitent être offensifs, ils le sont. En Europe, on tergiverse. Je veux que l’Europe propose une autre perspective de développement où l’humain passe avant le marché. Je veux que l’Europe soit généreuse et ouverte, je ne veux pas qu’elle soit offerte.
Si vous étiez Président, à quel pays réserveriez vous votre première visite officielle ?
L’Allemagne d’abord, pour la relance de l’Europe. Et ensuite l’Afrique noire, parce que la question du développement est une question majeure et qu’il faudra en finir avec ce qu’on appelle la “France-Afrique”. Je connais bien les africains et je les aime. La France doit être à l’avant-garde pour les aider à développer leurs projets et leur continent.
Mar, 31/10/2006 - 14:37
Aucun socialiste n'a le monopole du peuple
Laurent Fabius : "Aucun socialiste n'a le monopole du peuple"
Retrouvez ici l'interview de Laurent Fabius parue dans le journal
Le Parisien du 29 octobre 2006.
Vous avez reproché à Ségolène Royal, notamment avec son idée de « jurys citoyens », une dérive populiste. Mais le populisme, c'est quoi ?
Il faut toujours s'adresser à l'intelligence des citoyens et à leur raison. Quand on la creuse, l'« idée » de jury citoyen ne rassure pas car elle est ambiguë. S'il s'agit de créer des comités de surveillance des élus, transformant quelques citoyens en procureurs, on ne peut pas l'accepter, au nom même de la démocratie représentative et du respect du suffrage universel. S'il s'agit de consulter la population sur un projet précis et technique, c'est une possibilité parmi beaucoup d'autres, qui n'est d'ailleurs pas nouvelle. Donc, oui à la démocratie participative, non à la démocratie punitive. Aucun socialiste n'a le monopole du peuple.
Considérez-vous que le PS est aujourd'hui en danger ?
Non. Ce qui m'inquiéterait c'est que la candidate ou le candidat PS ne défende pas le projet socialiste et s'éloigne de nos fondamentaux. Force est de constater qu'aujourd’hui je suis le seul des trois candidats à défendre vraiment notre projet. En tout cas, je souhaite, puisque ce sont les militants qui vont se prononcer, qu'ils le fassent en toute liberté, sans se laisser impressionner par la mousse médiatique ou le bruit des sondages. Je leur dis donc : « Soyez libres. »
Diriez-vous qu'en un an il y a eu tout de même des choses de faites en faveur de la banlieue ?
On a eu droit à beaucoup de déclarations, mais, sur le terrain, rien ou presque rien n'a changé. Un exemple : les habitants de Clichy-sous-Bois attendent toujours le commissariat promis par M. Sarkozy. La tension devient aujourd'hui extrêmement préoccupante. Les jeunes ont le sentiment d'être agressés, les policiers aussi. Et les provocations se multiplient La réalité, c'est qu'envers les jeunes et les policiers le gouvernement a beaucoup promis et peu agi.
Quelle est votre vision du rôle du chef de l'Etat ?
Je suis pour une République parlementaire nouvelle. C'est le choix du PS et c'est le mien. Cela veut dire qu'il est temps d'en finir avec la pratique d'une sorte de monarque irresponsable à l'Elysée. Mais je suis frappé que tout se passe, quand j'entends mes concurrents à l'investiture socialiste, comme si on nous proposait au contraire un régime présidentiel renforcé. Je ne suis pas d'accord. Le président de la République a un rôle particulier d'impulsion et d'arbitrage. Et des prérogatives en politique étrangère et de défense. Mais j'insiste sur le rôle central du Parlement qui doit devenir le cœur battant de la démocratie. Et sur la responsabilité du Premier ministre. Un exemple : la grande conférence salariale que nous réunirons, ce ne peut pas être le « pacte de l'Elysée ». Le président ne mènera pas la discussion pendant des semaines avec le Medef et les responsables syndicaux. Ce sera au Premier ministre de le faire. Ce sera lui le capitaine, responsable politiquement devant l'Assemblée.
Pour mieux assurer la représentation de la diversité française à l'Assemblée, ne faudrait-il pas réintroduire une dose de proportionnelle ?
Si vous voulez parier de la diversité politique, ma réponse est oui. Le scrutin majoritaire permettra... une majorité, mais il faudra, grâce à une dose de proportionnelle, permettre que toutes les sensibilités politiques soient représentées à l'Assemblée. Pour le reste, c'est aux partis de prendre leurs responsabilités pour assurer une vraie diversité, mais je dis non à la politique des quotas. Je refuse toutes les discriminations.
Pourquoi, mardi soir à la télévision, avez-vous parlé avec tant de passion de la laïcité ?
Parce que la valeur laïcité est fondamentale et qu'elle est à l'origine de mon engagement politique. Parce que c'est un des grands atouts modernes de notre pays et une force pour notre République. Aussi, parce que M. Sarkozy, bien qu'il s'en défende, cultive, lui, une approche dangereusement communautariste. En France, nous avons une valeur de paix et de tolérance pour vivre tous ensemble : la laïcité. Soyons en fiers et défendons-la ! Et encore plus quand, dans tel hôpital, des médecins sont empêchés d'intervenir en fonction de l'appartenance religieuse d'un malade ou quand, dans telle école, un professeur d'histoire est empêché, pour le même motif, de parler de la Shoah. Je suis favorable à une charte de la laïcité adossée à la Constitution : elle définira les droits et les devoirs de chacun. Elle sera remise à tout Français au moment de sa naturalisation ou quand il reçoit sa carte d'électeur. A l'école, il serait utile que chaque année les professeurs puissent expliquer ce qu'est la laïcité. Je suis heureux de voir que mes camarades candidats disent aujourd'hui se ranger à cette analyse. Mais je me souviens qu'au moment du congrès de Dijon, il y a quelques années, j'étais bien seul à me prononcer pour une loi contre le port de signes religieux à l'école. Mon discours portait sur la République et s'appelait : « Marianne ne peut pas être voilée ». Cela dit il serait dangereux et faux que le combat pour la laïcité soit vécu par certains comme une attitude de défiance envers l'islam. Il faut au contraire que, parallèlement, des décisions soient prises pour que les musulmans puissent pratiquer leur religion de façon décente et en pleine égalité avec les autres cultes. Et cela, on peut parfaitement le faire sans mettre en cause la loi de 1905. J'entends bien être un président laïc.
Quand on vous classe « à gauche toute », avez-vous le sentiment d'être compris ou caricaturé ?
Je suis tout simplement à gauche. J'ai tiré les leçons du 21 avril 2002. J'ai tiré les leçons de la mondialisation financière, de la gravissime menace écologique et de la précarisation tous azimuts. Nos concitoyens veulent un président qui réponde, contre la dérive libérale, à l'urgence sociale et construise le futur. J'espère bien que ce message simple, celui du projet socialiste que je défends, sera de mieux en mieux compris. On ne réussira pas l'alternance en reprenant les recettes de la droite ou en copiant exactement celles que la gauche a mises en œuvre hier. La France a besoin d'un vrai changement à gauche, pas d'une nouvelle purge libérale ni d'une rustine sociale-démocrate à l'ancienne.
Propos recueillis par Dominique de Montvalon
Pour une société plus forte parce que solidaire
Laurent Fabius : En 2007, la gauche a un rendez-vous décisif avec l’école et les enseignants
Cher(e)s camarades,
La mondialisation financière n’a pas seulement précarisé l’économie ; elle est en train de diviser et de déchirer notre société. La rentabilité passe avant l’humanité, l’intérêt général après les intérêts particuliers. La marchandisation libérale creuse les inégalités et fabrique de l’insécurité sociale. La droite s’accommode de cette société du chacun pour soi. Pas nous. C’est le sens de ma candidature. Je crois qu’une autre société est possible, plus forte parce que plus solidaire. Je l’ai dit lors de nos deux premiers débats télévisés. Cela implique plusieurs engagements.
1) Bâtir l’Ecole de l’égalité réelle
L’école est le socle du pacte républicain. Quand elle est déstabilisée, c’est toute la société qui vacille. Oui, en 2007, la gauche a un rendez-vous décisif avec l’école et les enseignants. Nous devrons aider davantage les enfants qui en ont le plus besoin, notamment en augmentant les moyens accordés aux ZEP, et proposer un droit au soutien scolaire après la classe à tous les enfants. Pour casser les ghettos scolaires, il faut améliorer la carte scolaire, et non la supprimer. Nous garantirons aux meilleurs élèves de tous les lycées un accès aux formations en classes préparatoires. Enfin, nous ouvrirons une négociation avec les enseignants sur les conditions difficiles de leur métier. Pour le supérieur, nous devrons accroître massivement les moyens consacrés aux Universités. Pour lutter contre l’échec en premier cycle, nous améliorerons le soutien des étudiants.
2) Promouvoir la laïcité face au communautarisme et agir contre les discriminations
La laïcité est le pilier de notre vivre ensemble. Dans la fidélité à mon engagement du congrès de Dijon pour une loi contre les signes religieux à l’école, si je suis élu chef de l’Etat, je ne laisserai pas la loi de 1905 être démantelée. Une Charte de la laïcité dans les services publics, et d’abord à l’hôpital, sera adoptée. La laïcité sera enseignée à l’école et la diversité religieuse respectée dans notre pays.
La lutte contre les discriminations sera une priorité et l’Etat devra donner l’exemple. Nous renforcerons les pouvoirs de la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations.
3) Garantir l’égalité entre les territoires par les services publics
Sans territoires forts, rien n’est possible. Je suis partisan de la décentralisation. Socialiste et républicain, je crois à l’Etat dont la tâche première est d’assurer une égalité de traitement entre tous les territoires, qu’il s’agisse de la politique éducative et d’enseignement supérieur, de la santé, des équipements et des infrastructures. La France est une communauté nationale, en métropole et outre-mer, pas une simple addition de régions.
En 2007, il faudra garantir à chaque Française et à chaque Français un accès aux services publics essentiels que sont l’eau, l’électricité, la santé, l’éducation, la poste, la sécurité, le téléphone et l’internet. Je m’opposerai à la directive européenne de privatisation de l’activité postale prévue pour 2009.
4) Rétablir l’autorité de l’Etat et la sécurité
Comme toutes les inégalités, nous combattons l’inégalité devant la sécurité. Je ne laisserai pas dire que les socialistes ne s’occupent pas de sécurité. C’est faux et blessant pour nous tous, et d’abord pour nos élus locaux.
Le bilan de N. Sarkozy est calamiteux, nous ne pouvons pas nous inspirer de ses méthodes. En 2007, il faudra une autre politique de sécurité, fondée sur la police de proximité, que nous rétablirons, sur une justice plus efficace grâce à un budget augmenté, sur la prévention de la délinquance et l’aide aux victimes trop souvent oubliées. Etablissements éducatifs spéciaux pour adolescents en grande difficulté, séjour de rupture en centres éducatifs, développement des mesures de réparation comme alternative à la prison : nous défendrons la fermeté et l’humanité.
5) Promouvoir le pluralisme et la démocratie culturelle
Nous, socialistes, avons la culture au coeur. Elle ouvre sur le monde et sur les autres. Elle apprend l’esprit critique et le sens civique. Je souhaite que chaque jeune Français ait accès aux grandes disciplines artistiques. Les équipements sociaux et culturels des quartiers devront être une priorité. Nous soutiendrons la création artistique.
Pour les grands médias, notamment audiovisuels, il nous faudra préciser les règles d’équité, veiller à la déontologie et au pluralisme, redessiner les compétences et les modes de désignation des organes de régulation, soutenir l’audiovisuel public.
Cher(e)s camarades, la France du « marche ou crève » de la droite est une France en recul. Un pays est fort quand il porte un dessein commun et juste. Redonner un avenir à tous, et d’abord à notre jeunesse, par la solidarité et non par la concurrence généralisée, par l’égalité et non par la logique du plus fort, par la laïcité et non par le repli identitaire : voilà le dessein que je propose aux socialistes et aux Français. Une France forte parce que solidaire.
Ven, 27/10/2006 - 15:53
Laurent Fabius, le plus réaliste et le plus à gauche !
Laurent Fabius : Face au projet précaire et brutal de la droite, je répondrai à l’urgence sociale et je préparerai l’avenir.
Chers camarades,
Face à l’urgence économique et sociale, je veux partir de la réalité et affirmer une claire volonté politique. La réalité, c’est qu’une grande majorité de nos concitoyens vivent ou redoutent la précarité. Emploi, logement, accès aux soins, services publics : la précarité se généralise. Ma volonté, avec tous les socialistes, c’est de refuser cette prétendue fatalité et de proposer un autre projet de société.
La droite porte une responsabilité écrasante : France en déficit, recherche scientifique en panne, explosion des contrats courts, conditions de vie qui se dégradent.
La dérive libérale de l’Europe, pourtant refusée par les peuples, aggrave la situation.
Surtout, le capitalisme a changé. Industriel et national auparavant, le voilà financier et transnational.
« Tous concurrents et que le moins cher gagne », telle est sa règle qui conduit à de dramatiques impasses, humaines, sociales, climatiques, sanitaires. Si la gauche n’arrête pas cette course folle, qui le fera ? Face à un capitalisme dur, il ne faut pas un socialisme mou.
Ces choix permettront à la France de renouer avec une croissance forte et durable.
1) Première urgence, le pouvoir d’achat et l’emploi.
J’ai proposé de porter le plus rapidement possible le SMIC à 1500 €, dont 100 € tout de suite, et d’organiser une conférence salariale pour diffuser cette hausse aux petits et moyens salaires. Je propose aussi de garantir à tous les retraités ayant cotisé un nombre suffisant d’années un niveau de pension minimal qui devra s’approcher du SMIC. Les femmes qui ont eu des carrières morcelées auront ainsi une pension décente.
Nous créerons la Couverture Professionnelle Universelle (CPU). Par une garantie de revenus et un accès à la formation professionnelle permanente, elle permettra d’aménager les temps de transition professionnelle. Le CNE sera abrogé. Dans les grandes entreprises, les exonérations de cotisations sociales seront progressivement supprimées. Les ressources ainsi récupérées seront affectées pour les emplois jeunes, pour la recherche scientifique et l’enseignement supérieur, pour les investissements et la croissance des PME.
Le soutien au pouvoir d’achat et à l’investissement des entreprises doit nous permettre de renouer ainsi avec une croissance forte et durable, qui est indispensable.
2) Deuxième urgence : préparer l’avenir et mieux nous défendre dans la mondialisation.
Comme je m’y suis engagé devant le collectif « Sauvons la Recherche », le budget de la recherche sera augmenté de 10 % par an.
Avec le gouvernement, je proposerai à nos partenaires une réorientation de la politique monétaire, de la politique de la concurrence et de la politique commerciale de l’Union européenne.
En France, le principe du « délocaliseurpayeur » sera instauré : si une entreprise délocalise, elle devra rembourser les aides publiques reçues, payer la taxe professionnelle pendant trois ans et financer le reclassement des salariés concernés.
Pour limiter les OPA souvent destructrices d’emplois, les salariés disposeront d’un droit de contrôle étendu, à travers une double consultation du conseil d’administration et du comité d’entreprise.
3) L’urgence, c’est aussi d’agir pour le logement et la politique de la ville.
120 000 logements sociaux locatifs seront construits chaque année. Dans les communes ne respectant pas le minimum prévu de 20 % de logements sociaux, le Préfet se substituera au maire. La hausse des loyers sera limitée à celle de l’inflation.
Pour les quartiers, des « Pactes de Solidarité Urbaine » entre l’Etat et les agglomérations seront négociés et conclus. Nous développerons l’accompagnement social et éducatif précoce des mineurs dérivant vers la violence. Et nous lutterons contre toutes les discriminations.
4) Dans les quartiers comme dans les campagnes, le changement nécessitera des services publics forts.
Les enseignants seront confortés dans leur mission de transmission des savoirs. Les jeunes bénéficieront d’un soutien périscolaire public après la classe. De nouveaux moyens seront dégagés pour les élèves en difficulté.
Je défendrai l’hôpital public et veillerai à ce que des médecins s’installent partout sur le territoire. La prévention sera développée, notamment pour lutter contre l’obésité. Nous investirons pour réduire le temps d’attente pour les examens médicaux.
En matière énergétique, je demanderai un moratoire européen sur la dérégulation dans le domaine de l’énergie. Comme le prévoit notre projet, EDF repassera sous contrôle 100% public et sera rapproché de GDF. Cela ne nécessitera pas de fonds budgétaires. Un vaste plan d’économies d’énergie et de développement des énergies alternatives sera engagé et les transports les moins polluants auront la priorité.
Voilà, concrètement, quelques aspects majeurs de la politique économique et sociale que nous engagerons lors du prochain quinquennat. A la fois par la loi et par le contrat. Par le niveau national comme au niveau local. Face au projet précaire et brutal de la droite, je répondrai à l’urgence sociale et je préparerai l’avenir. Il s’agit de construire une France forte et solidaire. Forte parce que solidaire. Je m’y engage avec chacune et chacun de vous.
Ven, 20/10/2006 -